La diversité femmes-hommes contribue à la performance économique des entreprises. Cependant, une politique de diversité se heurte aux choix éducatifs et aux préférences professionnelles qui diffèrent entre les filles et les garçons.
Le poids des stéréotypes
Contribuer à la diversité est une obligation légale pour les entreprises. Au nom du principe d’égalité, elles doivent recruter et promouvoir leurs salariés quel que soit leur sexe, leur race ou leur religion. La responsabilité sociale des entreprises a renforcé cet impératif de justice dans le monde du travail. Ce principe d’égalité est perçu par certains employeurs comme une contrainte sociale qui nuit à la performance économique des entreprises. De nombreux stéréotypes associés à certains critères sociaux conduisent des employeurs à discriminer certaines populations au nom de l’efficacité organisationnelle.
Les contributions de la diversité
La recherche académique permet de confronter ces stéréotypes et de lutter contre la discrimination en construisant un business case à la diversité, notamment en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.
Une politique de diversité contribue de plusieurs manières à l’efficacité des organisations :
– Elle permet de constituer un pool de ressources humaines plus talentueuses en ne recrutant que sur la base des compétences et en refusant d’exclure un candidat sur la base de critères extra-professionnels. Selon le prix Nobel d’économie Gary Becker, les entreprises qui discriminent seraient automatiquement éliminées du marché par leurs concurrents plus performants employant des salariés plus productifs du fait de leur non-discrimination en matière de recrutement.
– La diversité apporte à l’organisation différentes expériences, connaissances, croyances et perspectives qui contribuent à la qualité des processus de décision et à l’innovation. Un grand constructeur automobile a confié à un groupe de femmes ingénieures le développement d’un concept-car dont sont issues de nombreuses innovations telles que la capacité d’un véhicule à continuer de rouler malgré une crevaison ou la création d’espaces de rangement originaux dans l’habitacle.
– La diversité contribue à une prise de risque mieux calculée. Lors de la crise financière de 2008, les banques européennes les plus engagées sur le marché très risqué des sub-primes et qui ont connu les plus fortes pertes étaient très peu féminisées (Royal Bank of Scotland, Dexia, UBS ou Deutsche Bank). En revanche, les banques plus féminisées comme BNPParibas ou les banques scandinaves ont mieux géré ces risques.
– Une politique de diversité contribue à la performance d’une entreprise en améliorant son image auprès de nombreuses parties prenantes. Les pouvoirs publics, les consommateurs, les investisseurs ou les candidats se préoccupent de plus en plus de la responsabilité sociale des entreprises avec lesquelles ils acceptent d’interagir.
Une étude récente[1] menée auprès de 159 grandes entreprises françaises montre que, dès lors qu’elle dépasse le seuil de 30 %, la diversité femmes-hommes contribue à la rentabilité financière des firmes.
Les freins à une politique de diversité
La diversité dépend également des choix éducatifs et professionnels des individus. Les filles et les garçons ne privilégient pas les mêmes filières de formation. La conférence des Grandes Ecoles relève que les filles ne représentent que 30,2 % des étudiants de la filière scientifique des classes préparatoires qui conduisent aux écoles d’ingénieurs contre près de 56 % de celles de la filière économique et commerciale qui orientent vers les écoles de management.
Les préférences professionnelles des filles et des garçons différent également et suivent certains stéréotypes. Les premières sont plus attirées par les métiers de la santé, du luxe et de la grande consommation et les seconds par l’automobile, l’énergie et les hautes technologies.
Il est plus facile de mener une politique de diversité pour une entreprise du luxe recrutant principalement dans les écoles de management que pour une entreprise du bâtiment qui source principalement ses candidats dans les écoles d’ingénieurs.
A propos de l’auteur : Michel Ferrary est chercheur affilié à SKEMA Business School et dirige l’Observatoire SKEMA de la féminisation des entreprises. Il est par ailleurs membre du Haut Conseil à l’Egalité.