L’interview de Romain Soubeyran, directeur de CentraleSupélec
Portrait de Romain Soubeyran : Crédit CentraleSupélec

CentraleSupélec en action ! – L’interview de Romain Soubeyran


Six verbes pour résumer la philosophie et les projets de la 2e école d’ingénieurs d’excellence 2022 selon le Figaro Etudiant ? Pari relevé par Romain Soubeyran, Directeur général de CentraleSupélec !

Servir

Nous servons l’Etat français bien sûr, mais aussi le monde économique et les entreprises, auxquelles nous devons apporter les jeunes diplômés qui renforceront leur impact. Nous servons la société également, car elle n’a jamais autant eu besoin d’ingénieurs du type de ceux que nous formons. C’est-à-dire, des ingénieurs capables d’appréhender des systèmes complexes dans toutes leurs facettes et de leur apporter des éléments de réponse. Mais cela suppose d’augmenter le vivier des futurs ingénieurs. Je pense particulièrement aux filles et aux élèves de milieux moins favorisés. Il faut dire le plus tôt possible à celles et ceux qui ont un vrai goût pour les sciences dures (sans forcément être des génies en la matière !) que s’ils entrent en prépa et qu’ils travaillent sérieusement, ils sont assurés d’en sortir avec une école dont le diplôme leur ouvre grand la porte d’un métier qui a du sens.

Mobiliser

Si je regarde mon agenda, c’est sans doute la mission qui me prend le plus de temps ! Nous devons d’abord mobiliser les personnels de l’école en valorisant toutes les réussites. Les élèves aussi bien sûr, fédérés autour de notre cursus unifié et de la vie étudiante très riche à CentraleSupélec. Les entreprises également : les convaincre que nous avons des élèves bien formés (nos excellents classements nous y aident beaucoup !), mais aussi les mobiliser financièrement. Sans oublier les candidats (qui plébiscitent justement notre vie associative, la marque Centrale et notre dimension internationale), les anciens, les donateurs, les autres établissements ou la Conférence des Grandes Ecoles, dont j’assure la présidence de la Commission Amont.

Pivoter

Pivoter, c’est savoir se remettre en cause en permanence : un état d’esprit originel pour l’école ! La fusion de Centrale et de Supélec est en effet un pivot en soi : c’était la première et encore aujourd’hui la seule fois ou deux écoles d’ingénieurs de premier plan fusionnaient. Autre pivot fondamental : la fondation de l’Université Paris Saclay et de ses Graduate Schools. Une occasion unique de déployer notre attractivité et notre image à l’international (où le diplôme d’ingénieur reste un « ovni français »), tout en offrant à nos élèves un accès à tous les champs de la connaissance, dans une logique d’hybridation croissante de notre cursus. C’est ainsi que nous pourrons continuer à attirer les meilleurs candidats internationaux, mais aussi retenir les candidats français tentés par un modèle plus international. L’entrepreneuriat est enfin un pivot essentiel. Notre présence à Station F, l’inauguration de notre Scale up Campus ou la mobilisation de nos anciens pour investir dans les startups nées à l’école, en sont des preuves récentes. Car les qualités d’un entrepreneur sont finalement celles qu’attendent les employeurs de nos ingénieurs : développer des innovations, créer de nouveaux business et avoir de l’impact.

Ouvrir

Je pense bien sûr à l’ouverture internationale via PSL et les écoles du Groupe des Ecoles Centrale à l’étranger. Mais aussi à l’ouverture sociale et de genre. Notre partenariat avec Acadomia, notre Summer Camp et notre engagement pour l’alternance (deux classes d’élèves recrutés en filières technologiques sont mises en place en alternance en 1A) vont d’ailleurs en ce sens. Je pense aussi à l’ouverture disciplinaire de notre cursus, avec un focus sur le développement durable / environnement et la santé.

Accompagner

Nous sommes là pour accompagner le développement de nos élèves et non pour les formater. La taille de l’école et de nos promotions permet d’ailleurs des parcours très individualisés à nos quasi 1 000 élèves de 1A, auxquels plus de 700 parcours différents sont proposés ! Nous sommes aussi là pour accompagner nos élèves lorsqu’ils rencontrent des problèmes. L’enquête que nous avons menée sur les VSS a ainsi permis une prise de conscience générale sur une réalité. Plusieurs plaintes ont été déposées depuis sa publication : cela montre que la parole se libère et qu’il n’y a pas d’impunité. Nous accompagnons également nos personnels et nos élèves en situation de handicap à travers notre Plan Handicap voté en 2020.

Anticiper

Nous essayons d’anticiper le plus tôt possible les évolutions du monde, les attentes et les besoins de nos parties prenantes, pour nous y préparer. Notre plan stratégique qui devrait être dévoilé à l’automne va bien sûr en ce sens.

>>>> Pour aller plus loin – découvrez l’interview de Romain Soubeyran réalisée en mai 2021 :

Avec des si – L’interview de Romain Soubeyran, directeur de CentraleSupélec

Partenariats de rêve, moyens illimités, clés du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Romain Soubeyran, directeur de CentraleSupélec se prête à l’exercice d’une interview 100 % prospective.

Votre dossier N°1 si vous aviez les clés du MESRI pour une journée ?

La priorité aujourd’hui, c’est la dégradation de la santé psychologique des étudiants liée à la crise. Et à moyen terme, je travaillerais à rapprocher d’avantage les mondes académique et professionnel. Car si la qualité de la recherche faite en France n’est plus à prouver, il y a aussi un vrai déficit dans notre capacité à la transformer en innovations générant des retombées économiques. Un étudiant en thèse au MIT se pose la question de savoir dans quelle startup créée par son directeur de thèse il va aller… on en est encore loin en France.

Si vous aviez des moyens illimités pour CentraleSupélec, que feriez-vous différemment ?

Paradoxalement, il est assez malsain d’avoir des moyens très surdimensionnés par rapport à ses besoins ! Car cela n’encourage ni la réflexion, ni l’innovation, ni la remise en cause. Mais si j’avais beaucoup plus de moyens, j’en garderais (quand même !) un peu pour CentraleSupélec et j’en affecterais l’essentiel à la restauration de l’ascenseur social. Afin qu’aucun talent ne soit pénalisé par l’autocensure, un défaut d’orientation ou des études pas assez stimulantes par rapport à son potentiel. Faire s’épanouir tous les talents c’est un enjeu crucial de compétitivité pour l’enseignement supérieur, la recherche et le monde économique français. Mais aussi un enjeu de citoyenneté fort auquel nous tenons à CentraleSupélec, comme en témoignent nos campus d’été Cap Prépa avec l’ESSEC, par exemple.

Si vous pouviez nouer un seul partenariat de rêve ?

Un partenariat n’est pas une fin en soi, c’est d’abord au service d’un projet. Et le projet de CentraleSupélec, c’est de former l’ingénieur hybridé du 21e siècle, qui met les outils des sciences de l’ingénieur au service de l’ensemble des secteurs d’activité. Le partenariat de rêve est donc celui qui nous connecte à tous les champs de savoirs. Co-fondateurs de l’Université Paris-Saclay, nous avons déjà réalisé notre rêve !

Si vous deviez consacrer une formation au développement durable ?  

Ce ne doit pas être une discipline à part, il doit imprégner l’ensemble de la formation de nos étudiants. Il est d’ailleurs déjà présent dans 70 % des séquences thématiques de 1A et 2A et dans 50 % des mentions en 3A. Et nous continuons à progresser. Il doit aussi influencer les actions et les choix de nos diplômés une fois en poste pour peser sur les décisions des organisations. 2/3 de nos étudiants choisissent d’ailleurs une entreprise en fonction de son engagement pour la durabilité.

Si vous étiez un futur ingénieur fan de RSE, pourquoi choisiriez-vous CentraleSupélec ?

D’abord, pour la taille de la promo. J’entends certains dire « 950 élèves c’est l’industrie » mais au contraire, c’est la possibilité de mettre en place un cursus très diversifié, et donc de mieux répondre aux vocations des élèves, en matière de développement durable notamment. De plus, dès la rentrée 2021, aucun ingénieur CentraleSupélec ne pourra être diplômé sans avoir validé la compétence Ethique, Exemplarité et Responsabilité de l’ingénieur, introduite dans le référentiel de compétences auquel est adossé notre cursus unifié depuis 2019.

Si vous imaginez CentraleSupélec dans 10 ans ?

Je souhaite que CentraleSupélec soit une institution où chacun est heureux de venir travailler et a le sentiment de contribuer à un projet global au service de la société. Une institution attractive pour tous les viviers de candidats, à tous les niveaux de formation, identifiée comme un lieu d’épanouissement pour leur potentiel scientifique et leur  personnalité. Je souhaite que les alumni se souviennent de leur école comme d’une période privilégiée dans leur vie. De tout cela découlera naturellement la performance interne, la reconnaissance de la contribution de l’école, le soutien de l’Etat et du monde socioéconomique, la fidélité des anciens à leur école et, pourquoi pas, leur soutien financier ! Voilà le cercle vertueux dans lequel je souhaiterais que l’école soit engagée.

L’info en + : zoom sur le Groupe des Ecoles Centrale

Le Groupe des Ecoles Centrales (GEC) réunit CentraleSupélec et les Écoles Centrale de Lille, Lyon, Marseille, Nantes et CentraleSupélec ainsi que trois écoles internationales : Centrale Pékin, Centrale Casablanca et Mahindra École Centrale. Le GEC rassemble ainsi 1 500 diplômés / an, 800 enseignants et chercheurs permanents et représente 12 % de la recherche dans les écoles d’ingénieurs de l’Education Nationale. Une taille et un potentiel comparables à ceux du Massachusetts Institute of Technology (MIT), de la Technische Universität Berlin ou des Facultés Polytechniques de grandes universités européennes ou américaines. Et un objectif : faire de l’ingénieur centralien un modèle reconnu et référencé à tous les niveaux en France et dans le monde.