En deux ans, Gabrielle Fitaire est passée du statut de débutante à celui de vice-championne de France et à l’Equipe de France de water-polo. Alors que le chemin semblait tout tracé pour vivre son rêve olympique, une blessure l’a ramené à la dure réalité. Retraitée à seulement 26 ans, elle tente de faire le deuil de sa carrière et de se reconstruire dans sa nouvelle vie d’étudiante à l’IÉSEG. Rencontre.
Quand elle découvre le water-polo à l’âge de 16 ans dans son Canada natal, Gabrielle ne s’imagine pas un destin sportif et encore moins un destin olympique. Pourtant, moins de deux ans après ses débuts dans le bassin et une fois son bac en poche, la voici professionnelle dans le championnat de France au sein de l’équipe de Bordeaux. Pour cette franco-canadienne fille d’un père français et d’une mère chinoise tout est allé très vite. « Je faisais de la natation et j’ai vu ce sport dans le bassin d’à côté. L’entraîneur m’a repérée pour mon gabarit et c’est comme ça que j’ai découvert le water-polo. En deux ans, je suis passée professionnelle, j’ai concouru dans le championnat de France et suis devenue vice-championne de France » explique celle qui est désormais étudiante à l’IÉSEG. Son poste de prédilection ? Attaquante, « car j’aime être face aux buts et me battre pour avoir le ballon ! » déclare-t-elle. Une détermination qui la pousse dans une trajectoire fulgurante l’amenant à Nice puis au Lille UC Métropole Water-Polo, une des meilleures équipes du championnat. Au sein de cette équipe, elle se découvre une deuxième famille 100 % internationale. « Il y avait une Tchèque, une Hongroise, une Slovaque, une Russe, une Hollandaise, une Américaine, une Italienne, une Allemande, une Canadienne et Finlandaise : nous ne parlions pas la même langue, mais nous nous parlions beaucoup avec les yeux. Comme nous étions toujours ensemble, nous arrivions à communiquer de manière de simple et directe. Quand tu t’entraînes six heures par jour avec les mêmes filles, tu connais les mécanismes, les passes, les shoots, le placement. Nous restions dans notre bulle, on s’entraînait, on mangeait, on vivait ensemble, on ne pensait qu’à ça » détaille Gabrielle.
Une carrière en équipe de France
Vivant le water-polo à fond, Gabrielle s’entrainait alors tous les jours dans et hors des bassins : nutrition, abdo, biceps, dos, squat, épaule, jambe pendant 1h30, cette hygiène et ces efforts lui permettent de devenir cinq fois championne de France et trois fois vainqueur de la Coupe de France. Un palmarès qui lui ouvre en grand les portes de l’équipe de France. « J’ai découvert l’équipe de France dès 2021, j’ai pu voyager en Italie, en Grèce, j’ai également fait le tournoi de qualification olympique pour les JO de Tokyo, nous avons terminé 8e de la Coupe du monde 2022, 7e des championnats d’Europe 2022 – nos meilleurs résultats – et nous avons fait la World League Super Final toujours en 2022 » précise-t-elle. Un palmarès qui tient notamment à une préparation de championne. « D’abord, de la musculation pour commencer la journée puis un entrainement dans l’eau pendant 2h, ensuite le repas, à nouveau dans le bassin pendant 2h et enfin nous terminions la journée par des étirements et de la préparation mentale. » Un programme dense pour des jeunes filles qui ne sont pas toutes professionnelles dans un sport, le water-polo féminin, qui bénéficie de peu de moyens en France et qui ne compte que sept équipes dans le championnat national. « La meilleure équipe est celle des Etats-Unis. Elle a de gros moyens et le système universitaire permet de sortir de très nombreuses joueuses » explique Gabrielle.
Aux portes des Jeux Olympiques
Mais alors que l’horizon semblait dégagé et le destin tout tracé pour vivre les Jeux Olympiques à domicile, Gabrielle va connaitre une terrible blessure. « Un moment très compliqué à vivre, sûrement le moment le plus difficile de ma vie. Je vivais dans ma bulle pour le water-polo et d’un coup, mon monde s’écroulait autour de moi. Je m’entrainais huit heures par jour, j’étais en déplacement tous les week-ends, toutes les vacances en stage, j’avais arrêté mes études et du jour au lendemain tout s’arrête » décrit Gabrielle. Même si elle remonte petit à petit la pente après cette fin de carrière anticipée qu’elle n’attendait pas du tout, la perspective des JO reste difficile à vivre pour l’étudiante à à l’IÉSEG. « Je ne serai pas en France en août prochain, j’ai besoin de me ressourcer et de rentrer au Canada. Depuis la blessure je n’ai pas remis les pieds dans un bassin. Je regarde tous les matchs et je suis encore en contact avec mes anciennes coéquipières mais c’est trop dur de retourner dans une piscine. D’autant que j’ai commencé à goûter à la vie sans le sport et je ne sais pas si je serai capable de replonger et de me donner à fond en sacrifiant tout le reste comme j’ai pu le faire par le passé » explique la championne.
Une nouvelle vie à l’IÉSEG loin des bassins
Cette blessure a aussi poussé Gabrielle à revoir ses plans pour l’avenir. Alors qu’elle avait prévu de mettre sa carrière en pause après les Jeux de Paris pour reprendre ses études, elle a dû avancer d’une année sa décision, sans avoir eu vraiment le temps de réfléchir à ce qu’elle souhaitait vraiment. C’est là que l’opportunité à l’IÉSEG s’est présentée. « Je voulais une formation qui m’ouvrait à l’international et j’ai vu que les inscriptions à l’IÉSEG étaient encore ouvertes. Je me suis dépêchée de faire mon dossier pour le programme du master qui me plaisait vraiment et qui propose des cours en anglais : cela me correspondait parfaitement. » Aujourd’hui en master International business, Gabrielle s’épanouit dans une classe où plus de 20 nationalités sont mélangées. Surtout, elle découvre la vie loin du sport et des privations induites par le plus haut niveau. « Aujourd’hui, je vais en cours, je peux papoter, je traîne avec des amis, je peux boire un verre, aller au cinéma, réviser. Même si je fais encore attention à mon alimentation, je suis beaucoup plus libre qu’avant. Néanmoins, le sport m’a appris la discipline et la ponctualité et je ne suis jamais en retard pour un cours ou un rendu de devoir ! » mentionne-t-elle. Alors qu’aujourd’hui son quotidien se situe loin des bassins – elle a refusé des offres de clubs européens – Gabrielle ne sait pas encore de quoi son avenir sera fait. « Je n’ai pas encore réfléchi à ce que j’aimerais faire, mais une chose est sûre, je vais voyager dès que je pourrais » conclut-elle.
Vers une médaille aux JO ?
Alors que l’équipe de France féminine donnera son maximum, l’équipe de France masculine fait partie des espoirs de médailles français pour les JO de Paris et serait ainsi la première française médaillée de la discipline depuis les JO de 1928. Demi-finaliste des derniers championnats du monde, les Bleus pourront compter sur une carte maîtresse, leur entraîneur Florian Bruzzo. « Il a été mon entraîneur pendant cinq ans et je sais qu’il a une capacité à amener l’équipe au plus haut niveau, je crois vraiment en eux » encourage Gabrielle.