La techno sinon rien ? Si sa légitimité repose sur de solides bases scientifiques, le directeur de la recherche et du développement n’en oublie pas d’être un manager affûté. Carte maitresse de la compétitivité de son entreprise, il est aussi au cœur d’enjeux géopolitiques trop souvent insoupçonnés.
Evidemment très technique, le directeur de la R&D tire également son épingle du jeu par sa capacité à gérer et à prioriser un portefeuille de projets. « Sa valeur ajoutée ? Allouer les ressources au bon endroit et au bon moment, utiliser son expertise technique pour reconnaitre le potentiel des futurs acteurs de la recherche, en interne comme en externe », indique Christophe Nachbaur.
Un garant de la souveraineté nationale
Un « nez » qui fait de lui un acteur clé dans la performance de son entreprise bien sûr, mais aussi de la nation toute entière ! « Ce qui fait la puissance d’un pays, ce n’est plus sa puissance militaire ou politique. Elle commence aujourd’hui avec la puissance technologique, qui déclenche la puissance économique et financière et irrigue, ensuite, la puissance militaire et politique. Celui qui maitrise la technologie a le pouvoir », affirme Christophe Stalla-Bourdillon. Le directeur de la R&D serait donc un pro de la géopolitique qui s’ignore ? « Nous sommes effectivement presque sur des enjeux de souveraineté nationale. Acteur du soft power de son pays, tout patron de R&D doit être conscient des priorités nationales et européennes, pour décider, par exemple, de continuer de travailler avec tel ou tel pays », ajoute Thomas Froehlicher.
Détecter les hot spots innovants à travers le monde
Il s’impose aussi comme une fin gestionnaire alliant force des grands groupes et agilité de petites boites. « On avait hier coutume de parler de la stratégie du collier de perles. Les grosses entreprises multipliaient les acquisitions de petites structures innovantes pour les dissoudre et les absorber. Aujourd’hui, halte à la dissolution et à l’exclusivité ! Ces perles continuent à travailler avec d’autres entreprises », ajoute le DG de Rennes School of Business. Mais pour continuer à être le modèle à imiter, encore faut-il être le premier à déceler ces talents, qui pour certains s’ignorent encore. Et pour les trouver avant tout le monde, pas de secret : il faut être en alerte sur tous les hot spots d’innovation dans les Stations F à travers le monde !
Au plus près de l’usager « Pour qu’elle soit légitime, la recherche intègre de plus en plus en amont les personnes auxquelles elle bénéficie. Et cela change profondément la façon de produire de la connaissance. Toujours soumis à l’exigence d’une grande rigueur scientifique, le directeur de la R&D doit aussi développer un savoir-faire de l’ingénierie bureaucratique et une certaine empathie et adaptabilité à ceux qui l’entourent. Les réalisations des living labs sont par exemple très stimulantes », précise Pascale Levet.