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Doctorat & Business – Quoi de neuf docteur ?

Le doctorat, passeport pour l’entreprise ? Encore trop souvent cantonné à la recherche pure et dure, le doctorat est aujourd’hui une option de plus en plus plébiscitée par les recruteurs. Surfant sur le modèle du PhD à l’anglo-saxonne, comment cette formation d’excellence devient-elle un atout pour le business ? 

 

Alors qu’il est le plus répandu et le plus haut grade des diplômes délivrés au monde, le doctorat n’est pourtant pas encore vu comme un Graal par les entreprises françaises. Alors même que « dans l’immense majorité des pays c’est un diplôme très prestigieux. Un sésame pour entrer dans l’enseignement et la recherche, mais aussi dans l’entreprise. En Allemagne par exemple, la plupart des grands dirigeants sont docteurs », introduit Thomas Froehlicher, directeur de Rennes School of Business. Une spécificité hexagonale due, en partie, au dualisme d’un enseignement supérieur français oscillant entre prestige des grandes écoles et tradition doctorale des universités. Mais qui tend à se fissurer…

 

Privé de docteurs ou docteur dans le privé ?

D’abord grâce aux conventions industrielles de formation par la recherche a.k.a « thèses Cifre ». Grâce à ce dispositif créé en 1981 et qui concerne aujourd’hui 1 thèse sur 10, le doctorant est salarié dans une entreprise dont l’activité est liée à son sujet de thèse. Etre docteur dans le privé, ce n’est donc plus un gros mot ! C’est même le choix de plus d’un tiers des doctorants 5 ans après leur soutenance de thèse et de 78 % de l’ensemble des docteurs. Ils représentent par exemple 12 % des effectifs R&D des entreprises.

 

Faire évoluer son business model…

Car avoir un docteur dans ses équipes, c’est aussi se doter d’un avantage concurrentiel sans pareil. Les GAFAM l’ont d’ailleurs bien compris. « Google, LinkedIn, Uber…, les entreprises du net sont les plus grands employeurs de PhD aux USA. Une grande partie de leur succès repose d’ailleurs sur leur capacité à s’entourer de spécialistes de la recherche académique et ainsi améliorer leur business model au regard de décisions validées scientifiquement », indique Grazia Cecere, professeure à IMT BS.

 

Et avoir toujours un coup d’avance !

Miser sur un doctorant, c’est aussi parier sur l’avenir. Se lancer dans une thèse, c’est se lancer dans une aventure qui durera au moins 3 ans et donc affirmer son sujet comme un sujet d’avenir. Même réflexion du côté entreprises. « A elles de déceler le hot spot, le sujet qui tue, at the edge, celui où elle sait qu’elle devra être à niveau 4 ans plus tard. Pour cela, elle a besoin de cadres et de consultants bien sûr, mais avoir, en plus, une personne capable de prendre de la hauteur, de l’envergure et de la profondeur de champs, lui assure une base académique sans pareil », ajoute Thomas Froehlicher.

 

Docteur ou le pro des soft skills 

Une excellence académique doublée de qualités plébiscitées par les recruteurs. « La thèse n’est pas un exercice solitaire ! Autonomie, travail d’équipe, capacité à combiner analyse très puissante et rigueur méthodologique : autant de soft skills appréciées en entreprise. Sans oublier la créativité. Une thèse, c’est 350 pages dont au moins 50 représentant vraiment votre petite contribution à la connaissance générale. Un saut dans le vide, quelque chose qui n’existait pas avant que vous l’écriviez » insiste le directeur de RSB.

 

Pourquoi faire sa thèse en entreprise ? « On y trouve la possibilité d’acquérir des données qu’on ne trouve pas ailleurs, de tester des théories et de faire avancer la science grâce à des cas pratiques vécus en temps réel par les entreprises », affirme Grazia Cecere. La preuve avec Saddam Charaabi, doctorant à l’EBI, qui travaille sur l’amélioration galénique et la diminution des effets indésirables de certains médicaments. « Je suis régulièrement en contact avec l’industrie, j’ai rencontré des acteurs des big pharma et ça me motive de plus en plus à me diriger vers une carrière de recherche en entreprise, plus applicative. Finalement, une thèse c’est 3 ans d’expérience professionnelle ! » conclut-il