Partenariat de rêve, moyens illimités, clés du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Marc Mézard, directeur de l’Ecole Normale Supérieure (ENS) se prête à l’exercice d’une interview 100 % prospective.
Si vous aviez les clés du MESRI pour une journée, quelles seraient vos trois premières décisions ?
D’abord, la revalorisation immédiate des salaires des enseignants et des enseignants-chercheurs : les écarts avec leurs homologues étrangers sont inacceptables. J’augmenterais également le budget de l’Agence Nationale de la Recherche. J’œuvrerais aussi pour le décloisonnement entre les organismes de recherche et les universités, notamment pour mieux accompagner les chercheurs vers l’enseignement. Une dynamique que nous avons déjà enclenchée à l’ENS, une école de formation par la recherche et pour la recherche.
Si vous deviez convaincre un mécène d’investir dans la recherche, que lui diriez-vous ?
De plus en plus de champs de recherche viennent en résonnance avec des questions de société majeures. Le changement climatique ou le développement de l’intelligence artificielle renvoient en effet à notre capacité à faire travailler ensemble des champs disciplinaires différents. Il en va donc de notre responsabilité d’école d’amener littéraires et scientifiques à travailler ensemble sur ces sujets. Nous construisons d’ailleurs un cursus transverse en ce sens.
Si on vous dit que l’ENS est une école élitiste, que répondez-vous ?
Qu’elle l’est ! Mais seulement si on l’entend au sens où nous sélectionnons nos étudiants sur un concours très difficile et que nous les amenons aux meilleurs niveaux internationaux. Mais ce n’est pas antinomique avec la diversité sociale. Nous avons en effet créé le concours normalien étudiant pour diversifier les profils intellectuels, scientifiques et sociaux parmi nos élèves. Car notre responsabilité c’est être capable de chercher les meilleurs talents partout.
Si vous deviez retenir un alumni de l’ENS ?
Esther Duflo qui a reçu le Nobel d’économie en 2019 pour ses travaux sur la réduction de la pauvreté dans le monde. Entrée à l’ENS par la voie de l’Histoire, elle s’est ensuite orientée vers l’économie pour travailler sur des sujets majeurs. Au-delà du magnifique exemple que cela donne de l’Ecole Normale, son Nobel nous réjouit et nous permet d’assoir notre position de première école formatrice de Prix Nobel au monde, devant le California Institute of Technology et Harvard.
Si vous deviez inventer un cours pour l’ENS ?
Une partie passionnante de mon travail consiste justement à identifier des voies où des besoins de formation se font sentir. C’est pour cela que nous avons créé le programme Médecine – Humanités en 2019. Nous proposons à des étudiants en médecine d’étudier la littérature, la sociologie, l’éthique…. Un diplôme qui répond aux nouveaux enjeux de la médecine liés à l’IA ou à la médecine personnalisée par exemple.
Si vous nous révéliez quelque chose qu’on ne sait pas sur l’ENS ?
Encore trop peu de personnes savent que l’on peut intégrer l’Ecole Normale Supérieure par le concours normalien étudiant, un concours ouvert aux étudiants universitaires littéraires en L3 ou scientifiques en L2 ou L3. Sélectionnés sur la base de leur parcours académique et de leur motivation pour une formation par la recherche, les admis suivent la même formation et obtiennent le même diplôme que les élèves issus de prépa.
S’il ne fallait retenir qu’une chose sur l’école ?
L’ENS donne à ses élèves la chance inouïe de pouvoir construire leurs rêves dans une des toutes meilleures universités au monde.
Le saviez-vous ? Portée par la création d’une nouvelle formation en biologie quantitative, l’ENS compte parmi ses plus beaux projets la construction d’un centre de biologie quantitative. Un bâtiment dédié à l’enseignement et à la recherche sur cette discipline et pour lequel l’école cherche activement le soutien de mécènes.