@ Astrid di Crollalanza

« Être un bon manager ne s’invente pas, ça se travaille »

Ludovic Girodon est l’auteur de Dream Team, le best-seller sur le management le plus vendu en France ! Également formateur de managers et conférenciers sur les thèmes du management et de l’engagement des équipes, il est convaincu que le management n’est pas fait pour tout le monde. Il explique pourquoi.

Un manager est-il nécessairement un leader ?

Il s’agit de deux figures très différentes. Etre un manager, c’est une hard skills, un métier, un statut, une fonction inscrite dans une fiche de poste. A contrario, être un leader, c’est une soft skill, une posture, une compétence que l’on a ou qu’on n’a pas. Si on peut être l’un ou l’autre, dans un monde idéal, ces deux compétences se conjuguent. On demande d’ailleurs de plus en plus à ces deux figures de fusionner, même si ce n’est pas toujours possible. Il faut aussi préciser que le leadership n’est pas réservé aux managers. Comme il s’agit d’une soft skill et non d’une compétence technique, tous les collaborateurs peuvent l’exercer à leur niveau. Et ce d’autant plus dans une époque où le monde du travail est plus demandeur d’une dimension participative que de marqueurs hiérarchiques.

« Un collaborateur va souvent gravir les échelons d’une entreprise jusqu’à atteindre son seuil d’incompétence maximal et y rester. Voilà comment des collaborateurs très compétents deviennent incompétents » écrivez-vous dans votre ouvrage. Il faudrait donc refuser les promotions hiérarchiques ?

La voie royale qu’on nous a vendue c’est celle d’une promotion pour devenir manager, mais il faut bien avoir en tête que tout le monde n’est pas fait pour être manager ! C’est un rôle à part entière qui nécessite des compétences spécifiques pour avoir des collaborateurs sous sa responsabilité, ce qui n’est pas une évidence. C’est d’ailleurs pour cela que je préfère le terme d’évolution à celui de promotion et que je milite pour la création de voies sans fonction hiérarchique. Des parcours d’évolution permettant à des personnes compétentes de changer de postes, sans pour autant que cela implique un rôle managérial.

Selon vous les managers portent deux casquettes : celle du management et celle de l’opérationnel. Mais est-ce vraiment possible de remplir simultanément ces deux missions à 100 % ?

Le temps est le principal problème du manager, on attend beaucoup de lui sans lui donner les moyens d’exceller dans tous les domaines. Un manager doit manager, mais il a en même temps trop d’opérationnel et de réunions à gérer, ce qu’il l’empêche d’être efficace. Idéalement, il faudrait inverser la pyramide. Plutôt que de voir des managers couteau-suisse s’occuper de plusieurs collaborateurs, il faudrait permettre à un collaborateur d’être accompagné par plusieurs managers hyper spécialisés.

Peut-on être formé à devenir un bon manager ou est-ce une compétence innée ?

Être manager demande un minimum de pré-requis : écouter et s’intéresser aux autres, avoir de la compassion, de l’empathie… Mais ça ne suffit pas pour être manager, un rôle qui, je le répète, n’est pas fait pour tout le monde. Le management est aussi une question d’inspiration, voire de reproduction. Généralement, un manager s’inspire de ce qu’il a connu avant : s’il a eu un bon modèle de manager, il pourra sans doute lui aussi devenir un bon manager. Dans le cas contraire, les mauvaises pratiques auront toutes les chances de perdurer. C’est aussi un rôle qui se construit en se confrontant à la réalité du terrain. Être un bon manager ne s’invente pas, ça se travaille.

Votre conseil de management le plus crucial en 2024 selon vous ?

Un manager n’est pas un mentaliste. Le manque de communication crée forcément des problèmes : plutôt que d’apporter des réponses, posez des questions !