En France, le coût moyen d’un étudiant est de 13 873 € par an (lemonde.fr, 24.02.2016). Pour des études dont la durée moyenne est de 4 ans, le coût moyen par étudiant pour sa scolarité est de 55 492 €. Cette part du financement public qui, en France, se situe aux alentours de 80 %, permet d’évaluer le coût réel de la scolarité d’un étudiant à 69 365 €. Très, très insuffisant ! Par Loïck Roche, Directeur général de Grenoble École de Management, Président du Chapitre des écoles de management
Pour comparatifs, la Suède dépense par étudiant 92 395 €, les Pays-Bas 92 131 €. Quant aux nations qui dépensent moins, par exemple la Corée du Sud (30 750 €), la part de financement public dans son enseignement supérieur ne représente que 30 % (lemonde.fr, 24/02.2016). Dit autrement, le coût total d’un étudiant en Corée du Sud est de plus de 90 000 €. Manque en France, et je ne parle pas des États-Unis, hors concours, pas loin de 50 %.
Qui dit manque de ressources dit manque de résultats
Le « prix à payer » est effrayant. Ainsi du rapport qualité-prix – c’est-à-dire, en regard des sommes investies, la capacité d’un étudiant au terme de ses études, dans un temps le plus court possible, à trouver ou créer son emploi au plus près de ses aspirations (type d’entreprise, métier, type de contrat, etc.). Si l’on considère le coût pour le contribuable par étudiant et le taux d’échec à l’université (pan central de notre enseignement supérieur), le rapport qualité-prix pose question. 39 % des nouveaux entrants à l’université réussissent en première année (etudiant.aujourdhui.fr, 21.03.2016). 27 % des étudiants inscrits en première année de licence obtiennent leur diplôme en trois ans. Et 40 % si on y ajoute ceux qui réussissent en quatre ans (letudiant.fr, 20.08.2015).
Pour les étudiants et les établissements, une incapacité réelle à bien travailler
Les raisons à cet échec sont connues. Là où elles devraient être excellentes, les conditions de travail ne sont pas bonnes. Le support à l’étudiant — c’est-à-dire la capacité à le conseiller, l’accompagner dans son parcours, trouver un stage, le préparer aux entretiens d’embauche, etc. — souvent faible. La capacité à attirer les meilleurs enseignants-chercheurs et étudiants étrangers, l’accompagnement à la digitalisation et à son impact sur les organisations, la mise en place d’innovations et d’expérimentations pédagogiques, etc. —insuffisante. L’ouverture à l’international, le lien étroit avec les entreprises, la responsabilité sociétale : ouverture sociale, diversité, etc. — encore à travailler.
Ce à quoi il faut renoncer, et ce qu’il faut réussir
Construire la part de financement qui manque fait nécessité. Les ressorts sont connus. Ils ne passent pas par un nouvel effort de l’État, celui-ci cotise déjà bien assez. N’en jetez plus ! Ni par une augmentation des frais de scolarité et ou droits d’inscription. Hors à jouer aux apprentis sorciers et créer à terme une bulle de la dette étudiante. Insupportable ! Non, cela passe par le développement de la formation continue, de la recherche partenariale, la création de fondations. Par un travail extrêmement précis avec les anciens, la capacité à se développer à l’international, à gagner des appels d’offres, à s’inscrire dans des projets européens, à se situer dans les réseaux des organisations internationales, etc.
Pour une véritable autonomie et une saine gouvernance
Guidé sur le fil d’une ambition très haute : par ses activités d’enseignement, de recherche, et d’innovation, contribuer au progrès de la société et à la compétitivité de notre Nation, l’enseignement supérieur doit devenir adulte. Poser que tout étudiant doit pouvoir suivre un cursus en lien avec son projet professionnel, poser que le supérieur ne doit pas ambitionner la réussite de tous mais doit donner à tous les moyens de réussir, poser que les établissements, pour les équipes, doivent être des lieux exceptionnels pour y exercer leur métier. S’en donner alors, et pour de vrai, parce qu’il en va de la place de la France dans le monde, tous les moyens.