L’innovation n’a jamais été autant cruciale dans un contexte de concurrence exacerbée. Or les grandes entreprises ne sont paradoxalement pas forcément les mieux armées pour innover. Pour cela, elles se tournent de plus en plus vers les startups ou tentent des greffes inédites.
Innovation : les grandes entreprises performent grâce aux… startups !
Les grandes entreprises sont en perte d’imagination
Les grandes entreprises sont toutes frappées par une malédiction ! Plus elles se développent et moins elles innovent ! Ce paradoxe étonnant a été bien identifié par les experts comme les grands patrons eux-mêmes. De multiples raisons expliquent cela : les grandes entreprises se sclérosent peu à peu et sont assez bureaucratiques. Elles sont moins soumises à la pression concurrentielle, sont moins agiles et sont donc tentées de prolonger la durée de vie de leurs produits. Pour certains observateurs, nous sommes mêmes arrivés à un point de bascule, où désormais les startups prennent le dessus sur les acteurs traditionnels.
Les startups déstabilisent les leaders
En effet, les startups n’ont pas d’autres choix que d’être beaucoup plus créatives, en cherchant à tout prix des solutions innovantes afin de bousculer le marché. Il n’est pas alors étonnant qu’elles disruptent ou ubérisent des secteurs entiers. Elles peuvent parfois simplifier le produit/service mais tentent surtout de créer différemment de la valeur pour le client. Et si cela fonctionne, c’est justement parce que les leaders se sont surtout reposés sur leurs lauriers et qu’ils offrent ainsi une faille stratégique aux concurrents potentiels. C’est justement en exploitant leur potentiel d’innovation que des (anciennes) startups (Spotify, Uber, AirBnb, BlaBlaCar, Doctolib, etc..) ont réussi à profondément bouleverser des secteurs.
L’ouverture pour une plus grande résilience
Dans ce contexte, les grands groupes ont pris conscience qu’il pouvait être vital d’aller chercher de l’innovation… ailleurs que chez eux. En effet, si une entreprise n’a plus de capacité d’innovation, autant la chercher là où elle est ! C’est ainsi qu’on a vu fleurir de nouvelles approches visant à casser les logiques traditionnelles. L’idée désormais est d’être plus souple, agile et de réaliser une greffe inédite : faire rentrer l’esprit startup dans les grands groupes ! Cela se traduit par différents types de structures ou programmes : programmes d’intrapreneuriat, open innovation, partenariat avec des incubateurs ou accélérateurs, programmes d’accompagnement ou d’investissements ciblés dans des startups.
L’objectif est de capter ou favoriser l’innovation…
… Mais également d’impacter la culture d’entreprise en introduisant une dose de « startup spirit » au cœur des grands groupes. La logique d’acquisition qui prévalait il y a quelques années (on « achetait » seulement l’innovation) est peu à peu remplacée par cette nouvelle approche. Désormais, il s’agit de faire pénétrer l’esprit startup au cœur des grands groupes afin de revivifier leur potentiel créatif, tout en bénéficiant des conditions confortables permises par le grand groupe. Ainsi, les parcours d’entrepreneurs et d’innovateurs ne se conçoivent plus exclusivement au sein de leurs propres structures mais bien dans cette alternance entre grands groupes et startups. Idéale sur le papier, cette situation, connaît cependant quelques limites. Des résistances internes d’un côté comme de l’autre peuvent exister, des problématiques de confiance mutuelle peuvent survenir et les freins bureaucratiques peuvent être légion. Comme dans toute greffe, il faut également s’assurer de la compatibilité entre le grand groupe et les entrepreneurs ou startup concernés. Cependant, toutes ces tendances actuelles vont néanmoins dans
le sens d’une plus grande collaboration entre ces différents acteurs. L’exemple du vaccin entre Pfizer, 1er groupe pharmaceutique mondiale et la startup Moderna le démontre de façon évidente.
L’auteur est Xavier Hollandts Professeur de stratégie et entrepreneuriat à KEDGE
Docteur et HDR en Sciences de Gestion, il enseigne l’entrepreneuriat et la stratégie à KEDGE BS. Il coordonne la Majeure Entrepreneuriat du PGE et accompagne les étudiants au sein la Business Nursery, l’incubateur de l’école.
Ses recherches se concentrent sur la gouvernance des entreprises et notamment les coopératives. Spécialiste des questions agricoles, il est membre du centre d’excellence Food, Wine & Hospitality de KEDGE BS. Il intervient régulièrement sur ces sujets dans les médias. De 2012 à 2019, il a animé la chaire de recherche Alter-Gouvernance. Il est l’auteur du Référentiel de gouvernance des coopératives agricoles. Ses travaux académiques ont notamment été publiés dans Corporate Governance, Journal of Institutional Economics, Managerial and Decision Economics, la Revue Economique, La Revue d’Economie Industrielle, la Revue Française de Gestion, Finance-Contrôle-Stratégie, Management International, ou la Revue Française de Gouvernance d’Entreprise.
Références
Freeman, J., & Engel, J. S. (2007). Models of innovation: Startups and mature corporations. California Management Review, 50(1), 94-119.
Parker, S. C. (2011). Intrapreneurship or entrepreneurship?, Journal of Business Venturing, 26(1), 19-34.
Usman, M., & Vanhaverbeke, W. (2017). How startups successfully organize and manage open innovation with large companies. European Journal of Innovation Management.