Sylvie Retailleau vient d’être nommée à la tête du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. En octobre 2021, en tant que présidente de l’Université Paris-Saclay, elle se prêtait à l’exercice d’une interview 100 % prospective dans le Journal des Grandes Ecoles et Universités. « Que feriez-vous si vous aviez les clés du MESRI ? » lui avait-on demandé à l’époque. De quoi s’inspirer dans ses nouvelles fonctions !
Sylvie Retailleau, si vous deviez résumer l’Université Paris-Saclay en un pitch ?
C’est une université qui a la tête dans les étoiles et les deux pieds dans le territoire. Un parent d’étudiant nous a écrit récemment sur les réseaux sociaux « Merci, vous confirmez mon avis sur cet établissement brillant et aussi humain ». Un message qui fait chaud au cœur bien sûr, car il reconnait d’une part notre fierté de mettre en avant le potentiel et l’excellence disciplinaire de notre communauté, cette force du collectif et notre engagement pour le soutien et la réussite de tous.
Si vous aviez les clés du MESRI pour une journée, quels seraient vos chantiers prioritaires ?
Une journée ne serait sans doute pas suffisante ! D’abord parce que le temps politique n’est pas celui de l’enseignement supérieur. Nous sommes soumis à des réformes énormes qui vont trop vite : nous avons besoin de temps et de relais pour que quelque chose se passe sur le long terme. Très concrètement, je voudrais convaincre Bercy que l’ESR n’est pas une dépense mais un investissement pour l’avenir. Un investissement indispensable et rentable, car nos établissements ont un impact réel et chiffré sur l’emploi, les territoires, le commerce, le lien avec l’industrie… Alors même que Paris-Saclay est 14e du Classement de Shanghai avec un budget 5 fois plus petit que les autres établissements du Top 15. Et ce n’est pas qu’une question de recherche de ressources propres. Leurs subventions pour charges de service public sont biens plus importantes que la nôtre. Je souhaiterais enfin faire reconnaître les universités comme opérateurs de recherche. De toute la chaine de recherche, de la plus fondamentale à la plus appliquée. Car c’est en grande partie grâce à elles que nos sociétés développées pourront relever les grands défis et enjeux du monde.
Si vous aviez des moyens illimités pour l’Université, que feriez-vous différemment ?
Je ferais pareil… mais plus grand ! Des évolutions pas des révolutions, tout en n’ayant pas peur bien sûr de faire différemment lorsque c’est nécessaire. Par exemple, j’augmenterais radicalement les taux d’encadrement pour favoriser la personnalisation de l’apprentissage, capitaliser sur les différences de chacun et générer une vraie diversité de parcours de réussite. Car la réussite ne se limite pas au diplôme. Réussir à l’université c’est en sortir avec une expérience des acquis valorisable et un projet professionnel. Oui le diplôme a de la valeur, mais ce qui compte c’est que l’étudiant soit heureux et fier de là où il est.
Si vous pouviez mettre fin au clivage universités / grandes écoles ?
Je montrerais l’Université Paris-Saclay en exemple ! Ce côté très « clanique » qui pouvait se comprendre hier ne correspond plus aux demandes des étudiants et du 21e siècle. Nous avons besoin de cohérence et d’une certaine force de frappe pour éduquer nos étudiants, dans leur diversité de profils, à être des citoyens qui comprennent l’autre, sans vase clos. Je voudrais que notre université soit un modèle donnant envie aux autres d’expérimenter des choses, ensemble.
Sylvie Retailleau, si vous imaginez l’Université Paris-Saclay dans 10 ans ?
Je vois déjà quelque chose de plus stable et de plus calme qu’en 2020 ! Mais aussi une université reconnue comme une des meilleures, si ce n’est la meilleure, européennes. Une université ouverte sur le monde : l’Europe bien sûr (un de nos challenges majeurs), sur l’international et sur le monde d’aujourd’hui, qui apporte sa pierre à la construction de la société. Un lieu où il fera bon vivre, étudier, travailler et entreprendre… et un lieu mieux desservi par les transports !
A retrouver dans le même dossier : Agilent
Le saviez-vous ?
Paris-Saclay regroupe désormais sous une même bannière, des acteurs de poids de l’enseignement supérieur (Université Paris-Sud, CentraleSupélec, ENS Paris-Saclay, AgroParisTech, IOGS) et des organismes de recherche publics (CNRS, CEA, INRA…). L’université rassemble 48 000 étudiants, 8 100 chercheurs et enseignants-chercheurs, 275 laboratoires, 13 000 publications par an (soit 13 % du potentiel de recherche français).