Le BTP face aux enjeux de développement durable

Avec près de 300 milliards d’euros de chiffres d’affaires chaque année, le BTP représente 8 % du PIB français mais pèse lourd dans la balance écologique. En effet, il serait à l’origine de 25 à 30 % des émissions de gaz à effet de serre. Le secteur du BTP doit aujourd’hui faire face  aux enjeux de développement durable. On en parle avec nos experts.

Qui dit BTP dit construction dans l’esprit collectif. Mais Olivier Deck, responsable du département Géosciences et Génie civil aux Mines Nancy rappelle que ce secteur est beaucoup plus large et complexe. « Le BTP, ou génie civil, ne se limite pas qu’à la construction de bâtiments, routes, ponts, tunnels, etc. Il y a de vraies problématiques de terrain, de matériaux, de structures et d’équipement, d’énergie. » Et parmi les grands enjeux, celui de la construction durable tend à prendre une place de plus en plus conséquente. En effet, le BTP a un rôle à jouer dans la transition écologique et énergétique mais doit pour cela, repenser ses méthodes de construction.

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BTP : quels enjeux de développement durable ?

« Le BTP doit aujourd’hui mesurer son impact sur l’environnement naturel : la pollution, le bilan carbone avec l’analyse du cycle de vie du bâtiment, l’imperméabilisation des terrains, etc. » expose Olivier Deck. Pour cela, des lois et certifications existent déjà. La certification haute qualité environnementale par exemple, qui permet d’attester des performances d’un bâtiment et de répondre aux grands enjeux de la ville durable. Pour aller plus loin, la loi sur la transition énergétique prévoit elle l’objectif « de disposer d’un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments sont rénovés en fonction des normes “bâtiment basse consommation” ou assimilées, à l’horizon 2050, en menant une politique de rénovation thermique des logements concernant majoritairement les ménages aux revenus modestes. » Autre exemple : la réglementation environnement 2020 qui a, elle, pour objectif de restreindre l’empreinte carbone des constructions neuves. « On voit bien que la construction a tout un tas d’interactions avec ces enjeux de développement durable » expose Olivier Deck. Seulement, selon l’expert des Mines Nancy, « la conscience de la nécessité d’afficher des objectifs ambitieux existe depuis au moins 20 ans mais les actions menées ne sont pas à la hauteur des enjeux. » Le nerf de la guerre : l’aspect économique mais aussi la sensibilisation aux enjeux de développement durable. « A minima, les constructeurs doivent respecter la loi. Ensuite ce sont les élus, les particuliers ou plus généralement les propriétaires qui vont décider s’ils veulent aller au-delà des réglementations. Dans ce cas, les questions suivantes se posent : sont-ils prêts à payer plus cher pour un bâtiment durable et acquérir un logement qui va utiliser des technologies un peu plus incertaines ? » questionne Olivier Deck. « Si l’on veut que les choses changent vite, il faut passer par la loi. Au risque sinon d’une inertie importante car les systèmes sont complexes, incluent beaucoup d’acteurs et les pratiques mettent du temps à évoluer. »

Quid des formations ?

Côté formation, les choses sont également amenées à évoluer puisque beaucoup de métiers seront à réinventer à l’avenir. A l’école des Ponts ParisTech, Arthur Lebée, adjoint au président du département Génie Civil et Construction constate déjà une évolution dans les formations. « Il y a une évolution depuis une dizaine d’années à l’école des Ponts : les formations se tournent vers des façons de concevoir qui se préoccupent des impacts sur la nature et l’environnement, assure-t-il. Aujourd’hui avec l’évolution des lois de plus en plus exigeantes, les entreprises vont être obligées d’opérer des changements majeurs et il est normal qu’on accompagne ces changements via la formation. » Arthur Lebée rappelle tout de même que si les savoirs techniques et technologiques évoluent, la science, elle, reste le meilleur atout pour répondre à ces défis « et les ingénieurs ont toute leur place pour maîtriser les sciences et techniques et répondre à ces défis. »