Le microcrédit fait beaucoup parler de lui dans les pays pauvres, mais il s’est également révélé être un outil financier pertinent pour les pays développés. Qu’en est-il de la France ?
L’histoire du microcrédit
« Une terrible famine frappait le pays, et j’ai été saisi d’un vertige, voyant que toutes les théories que j’enseignais n’empêchaient pas les gens de mourir autour de moi ». C’est dans ce contexte que Muhammad Yunus réfléchit à un outil qui permette aux bangladeshi de sortir de la misère. Il met en place le microcrédit en 1977, destiné au financement des microprojets d’une population essentiellement rurale, illettrée et exclue du système bancaire formel. Son modèle est exporté avec succès dans les pays en voie de développement, mais également dans les pays du Nord où la réalité économique semble pourtant à des années lumières de la cible initiale du professeur. La première économiste à introduire ses méthodes en France est Maria Nowak. Elle fonde l’Adie (Association pour le droit à l’initiative économique) en 1989, le principal acteur du microcrédit en France, reconnu d’utilité publique.
Le microcrédit en France
La France est l’un des pays européens où le microcrédit est le plus développé. Il permet de lutter contre la pauvreté et l’exclusion bancaire, en se déclinant sous deux formes : le microcrédit personnel (destiné à la consommation) et le microcrédit professionnel, pour les micro-entrepreneurs qui ne peuvent prétendre à un prêt bancaire classique. Dans un pays où le tissu économique est essentiellement composé de PME et de TPE, il s’agit de permettre à des personnes exclues du marché du travail, des allocataires des minima sociaux, et des jeunes de trouver les ressources financières pour entreprendre, créer leur emploi et générer leurs propres revenus. L’Adie se substitue ainsi aux banques pour prêter de faibles montants – le prêt moyen est inférieur à 3 000 euros – à ceux qui souhaitent créer leur entreprise, avec des taux d’intérêt d’environ 13 %. Ce prêt est très souvent complété par des primes régionales, des prêts d’honneur (à taux zéro) et par une aide de l’Etat, l’Accre, sous forme d’exonération de charges sociales pendant un an. Aujourd’hui, les micro-entrepreneurs disposent d’un statut juridique ainsi que de régimes fiscaux et sociaux spécifiques, afin de faciliter leur démarche.
Des micro-entrepreneurs formés et encadrés
La vocation des institutions de micro-finance est très clairement sociale, elles militent pour un modèle économique alternatif qui se veut viable. Il y a une réelle volonté d’impliquer les personnes les plus en difficulté : 77 % des clients de l’Adie ont un niveau scolaire inférieur au baccalauréat et 43 % d’entre eux sont titulaires des minima sociaux. Néanmoins, l’obtention d’un microcrédit ne se traduit pas miraculeusement par une entreprise prospère. Comme on a pu l’observer dans certains pays en développement, faciliter l’accès au crédit à des personnes considérées comme insolvables peut créer un cercle vicieux du surendettement et conduire paradoxalement à une dégradation de la situation financière. C’est pourquoi les micro-entrepreneurs soutenus par l’Adie font l’objet d’un suivi personnalisé (montage financier, choix du statut, études de marchés, démarches administratives,…) après obtention d’un prêt. Cet accompagnement étant indispensable à la solvabilité des micro-entreprises, et dans le cadre d’une aide de proximité bénévole, l’association étudiante Transaction EDHEC a pour projet de fournir une formation aux techniques financières de base aux micro-entrepreneurs qui le souhaitent, suivie d’un colloque au cours duquel ils pourront présenter leur projet à des investisseurs potentiels. La sensibilisation à toutes les échelles conditionne le développement de la micro-finance, et le soutien des pouvoirs publics est indispensable à son bon fonctionnement. De nombreuses initiatives à l’échelle mondiale et européenne ont été prises en ce sens, comme l’organisation de l’Année Internationale du microcrédit en 2005 et la mise en place du Réseau Européen de la Microfinance (REM) en 2003. En France, Christine Lagarde propose quatre mesures en faveur du microcrédit en mars 2010. Cependant les actions de proximité sont capitales : campagnes d’information, cercles de réflexion, prise de contact avec les micro-entrepreneurs dans les zones sensibles, ….
Renseignez-vous : tout un chacun peut mettre ses compétences au service de ceux qui n’ont pas les moyens d’entreprendre.
Hind Seddiqi, membre de Transaction EDHEC
Contact :Hind Seddiqi
hind.seddiqi@transac-edhec.com
Timothée Desille
président de Transaction EDHEC
timothee.delisle@transac-edhec.com