De nombreuses études témoignent d’une quête d’autonomie et de responsabilisation des salariés : Quel rôle le manager a-t-il à jouer ? Est-il voué à l’obsolescence programmée ou au contraire à se renouveler pour (re)devenir le pivot central de la performance individuelle et collective ?
Salariés sous le prisme du pragmatisme
En octobre 2022, un sondage mené par OpinionWay sur « Le travail en France entre quête de sens et nouvelles aspirations » a révélé que 37 % des personnes de moins de 30 ans vérifient en priorité, avant de rejoindre une entreprise, les garanties qu’elle offre en termes de flexibilité (télétravail, souplesse des horaires, choix des jours de congés). Juste derrière la rémunération, les conditions offertes aux candidats en termes d’horaires et de lieu de travail deviennent une source d’attractivité des entreprises. De même, une étude de la société Qualtrics a montré qu’en 2022, 35 % des salariés interrogés seraient susceptibles de quitter leur travail s’ils étaient forcés de travailler à temps-plein en présentiel. Les résultats de ces études déclenchent une réflexion sur le rôle du manager.
Le manager doit motiver par la gestion du temps
Il y a une unanimité sur le fait que la motivation des collaborateurs constitue un des axes majeurs de la mission d’un manager. A côté des leviers traditionnels de la motivation des salariés (variété des compétences, identité et importance de la tâche, autonomie et le feed-back pour reprendre le célèbre modèle des caractéristiques du travail du psychologue J. Richard Hackman et l’économiste Greg R. Oldham dans les années 70), il y a une dimension manquante devenue centrale aujourd’hui : la gestion du temps. Justement, le décloisonnement du temps et de l’espace de travail s’est accéléré et s’est installé durablement dans les organisations notamment après la période de la crise de la Covid. Cela renforce l’importance de la capacité de tout un chacun à gérer son temps en vue d’un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Le nouveau défi du manager est d’amener ses collaborateurs à avoir un rapport au temps vécu selon un mode choisi et non pas subi.
Performance individuelle et collective : penser à l’ancrage temporal
La fixation d’objectif SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et Temporellement défini), à laquelle sont formés les managers, représente un point d’ancrage autour duquel s’organise le collaborateur. D’où la nécessité de porter une attention particulière au « T » de SMART : un objectif temporellement défini. A côté de l’enjeu de performance individuelle, l’essence même du management réside dans la création du collectif : fluidifier les processus, coordonner les efforts individuels, allouer les ressources, réguler les comportements individuels et collectifs pour une gouvernance adaptative (Mickael Drouard, Stéphane Pensivy et Yann Bresson, 2021). Dans ce cadre, le manager a à sa disposition toute une batterie d’outils tels que la matrice d’Eisenhower pour définir ses priorités, la to-do list, le daily action planner, la gestion des réunions, la méthode des 5 S (Trier, Ranger, Nettoyer, Maintenir l’ordre, Suivre), la méthode GTD « Getting Things Done » (Collecter, Traiter, Organiser, Réviser, Agir). Qu’en est-il de l’enjeu émotionnel ? Certes, l’efficacité et l’efficience sont les deux maîtres mots du management, mais on ne peut pas faire abstraction de l’enjeu émotionnel de la gestion du temps : pression, anxiété, perception d’accélération du temps, mal-être au travail, manque de concentration qui en découle. Ainsi, le rôle du manager est de faire trouver aux collaborateurs des solutions aux trois principaux enjeux de la gestion du temps (Hervé Coudière, 2020) : un enjeu d’efficacité personnelle, un enjeu de la collaboration et un enjeu émotionnel.
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Nadia Tebourbi, Docteur en sciences de gestion, Chef du département Management et RSE, Professeur de management, Responsable de la spécialisation de master « Sustainable Human Development » PGE, ESCE, Paris