[Le pouvoir a-t-il un sexe] « Le combat pour l’égalité n’est pas terminé ! » Anne Hidalgo

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Des cabinets ministériels à la Mairie de Paris en passant par le Conseil Régional d’Ile-de-France, Anne Hidalgo occupe depuis de nombreuses années des postes politiques de premier plan. Une exposition publique et médiatique qui soumet l’actuelle Maire de Paris aux critiques mais qui, elle l’assure, ne l’empêche pas de mener les combats auxquels elle croit.

 

Vous occupez depuis de nombreuses années des postes politiques de premier plan. Pour vous, le pouvoir a-t-il encore un sexe au 21e siècle ?

Le combat pour l’égalité n’est pas terminé, l’actualité nous le montre chaque jour. Si la parité progresse, dans les entreprises comme dans les assemblées politiques, nous sommes encore loin de l’égalité réelle. Les hommes investissent encore davantage l’espace public que les femmes. Ils sont mieux rémunérés et moins prompts à sacrifier leur carrière pour se consacrer à leur vie familiale. On ne leur fait pas le reproche d’avoir de l’ambition ou de l’autorité. Ils ne s’excusent pas d’être là.

Le cœur du problème, c’est la légitimité ; celle qu’on accorde aux femmes et celle qu’elles s’accordent elles-mêmes. Et derrière la question de la légitimité, il y a celle de la confiance : fait-on confiance aux femmes et les femmes se font elles suffisamment confiance ? Il me semble que nous pouvons encore progresser. Hommes et femmes sont complémentaires, la politique doit être le reflet de la société. Je crois profondément aux bénéfices de la diversité : partout, tout le temps. Le pouvoir doit se nourrir de cette diversité.

Une femme aux commandes : ça change quoi ?

Ça ne change strictement rien ! Ce qui change en revanche, c’est la perception qu’en ont les gens. J’essuie toutes sortes de critiques, dont certaines relèvent exclusivement de ma féminité. À quel homme reproche-t-on d’avoir de l’autorité ou d’être pugnace ? Les hommes et les femmes sont en mesure d’exercer le pouvoir avec leurs qualités propres ; des qualités qui tiennent davantage à leur formation, à leur expérience et à leur personnalité qu’à leur… genre. Résumer le pouvoir au genre, c’est véhiculer les stéréotypes les plus archaïques, c’est manquer de discernement et même, d’honnêteté. Je m’y refuse catégoriquement.

Il se trouve que je suis une femme, et donc peut-être plus sensible à la situation des femmes. Mon rôle de Maire – de tous les Parisiens, de toutes les Parisiennes –, c’est notamment d’aider les femmes à être plus visibles, mieux représentées. C’est ce que nous avons fait en ouvrant une halte réservée aux femmes au sein de l’Hôtel de Ville, lorsque nous nous sommes aperçu qu’elles étaient nombreuses dans la rue et qu’elles avaient des besoins spécifiques. Mon rôle est de veiller à ce que chacun et chacune dispose des mêmes chances, et rééquilibrer les choses si nécessaire.

 On vous sait très engagée contre les violences faites aux femmes. Est-ce encore forcément un combat féminin ?

Il faut prendre conscience de l’ampleur du phénomène : en France, aujourd’hui, une femme est tuée par son conjoint ou ex-conjoint tous les deux jours et demi. Au-delà, 220 000 femmes sont victimes de violences commises par l’homme qui partage ou partageait leur vie. C’est tout simplement insupportable.

Alors non, lutter contre les violences faites aux femmes n’est pas qu’un combat de femmes, c’est un combat pour les droits humains, qui doit être mené par tous : les associations, les collectivités, l’État et bien sûr les citoyens. Seule une prise de conscience globale et une action coordonnée – à l’image de ce qui se fait en Espagne depuis 15 ans – nous permettront de réduire le nombre de féminicides.

A Paris, ce n’est pas que moi, mais toute d’administration qui s’engage avec détermination contre les violences faites aux femmes. En 2014, l’Observatoire parisien des violences faites aux femmes a été créé. Les subventions aux associations dédiées aux femmes victimes ont été augmentées de 23 % en 2018 et de 25 % en 2019. Nous renforçons l’accès prioritaire au logement social pour les femmes victimes de violences. Fin août, un nouvel accueil de jour pour les femmes de 15 à 25 ans victimes de violence a été inauguré à la Porte de Bagnolet, en coopération avec la Seine Saint Denis, la Région et l’État. Seule une mobilisation de tous permettra de faire bouger les choses.

Votre message à une jeune femme qui aurait peur d’assumer ses ambitions ?

Je lui dirais sans doute : « soyez vous-même, ayez confiance en vous, suivez vos intuitions et ne laissez personne vous détourner de vos convictions, mais restez ouverte et à l’écoute en toutes circonstances ; c’est dans l’échange, dans l’ouverture aux autres qu’on avance ».

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