Rencontre avec Patrick Gérard, conseiller d’État et directeur de l’ENA depuis un an. Ouverture sociale et intellectuelle, pédagogies innovantes, l’institution affirme son ambition de former des hauts fonctionnaires acteurs et promoteurs du changement, au service de l’intérêt général et de l’État.
L’ouverture est devenue un maître mot de l’ENA, à commencer par les profils de vos étudiants ?
La diversification des profils témoigne d’une double ouverture. D’abord sociale à l‘image de notre prépa intégrée créée en 2010 à Paris. Elle accueille 25 étudiants par an, brillants et issus de milieux modestes. Nous ouvrirons à la rentrée 2019 une deuxième classe sur ce modèle à Strasbourg. L’ouverture est également intellectuelle avec la création en 2019 d’une 4è voie d’entrée à l’ENA pour les docteurs des disciplines scientifiques. L’objectif est d’intégrer des profils maîtrisant des enjeux phares pour la Nation et son administration : environnement, bioéthique, IA, algorithmes.
L’ouverture se fait aussi sur le terrain avec un an de stages ?
Reçus en décembre, nos élèves partent dès février en stage. Le premier stage est une ouverture internationale en Ambassade ou au sein d’une institution européenne. Le deuxième est réalisé aux côtés d’un préfet, pour aller au contact de nos concitoyens et travailler au déploiement de la politique gouvernementale sur le terrain. Le dernier se déroule auprès d’un chef d’entreprise. Les stages comptent pour 39 % de la note finale.
Management, sport, langues, éthique, géopolitique, le cursus est lui aussi très diversifié ?
Durant la 2è année à Strasbourg, les élèves traitent de sujets utiles à de futurs hauts fonctionnaires : légistique, politique des territoires, gestion publique, urbanisme, économie, finances publiques, négociation de budget ou de texte européen. Ils développent aussi une approche transversale des problématiques éthiques, sociétales, internationales et environnementales. Ils suivent également depuis cette année des conférences d’actualité scientifiques.
Jeux de rôle, hackathon, l’ENA renouvelle sa pédagogie ?
Nous faisons beaucoup travailler nos élèves en équipe et en situation. Ils participent à des jeux de rôle pour se mettre dans la peau de décideurs publics. Ils mènent aussi des études de cas en management public, en gestion de projets, en gestion de crise. Cette année, nous avons initié un hackathon avec l’école Epitech. Nos étudiants ont imaginé une App pour un service public. La mise en situation passe par ailleurs par la réalisation de rapports sur commande de différents ministères.
Quelles qualités prodigue cette ouverture ?
La capacité à travailler ensemble
Etre à l‘écoute
Et surtout travailler pour les autres, être au service des ambitions collectives du pays. Nos étudiants consacrent aussi tous du temps à une association sociale, c’est leur devoir de le faire
Lorsque de sa visite, Édouard Philippe a conseillé à nos élèves : « Prenez votre travail au sérieux sans vous prendre au sérieux », c’est exactement l’esprit dans lequel sont formés les énarques !
Où exercent les jeunes diplômés de l’ENA ?
En fonction des postes ouverts, de leur classement et de leurs souhaits, ils sont majoritairement administrateurs civils dans tous les ministères, à la Ville de Paris, à la Caisse des dépôts. Quelques-uns sont diplomates en Ambassade ou directeurs de cabinet de préfet, ou encore magistrats, au sein de chambres régionales des comptes ou des tribunaux administratifs. D’autres enfin entrent dans les corps de contrôle, à l’inspection générale des finances, au Conseil d’État et à la Cour des comptes.
Les énarques cassent les codes ?
« Par des pédagogies innovantes nous entendons donner la priorité à l’imagination, à l’initiative. C’est indispensable pour préparer ceux qui conduiront les politiques de demain et accompagneront l’administration à relever les enjeux de sécurité nationale, environnementaux ou liés à la transition numérique. »
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