La CGE s’empare de la question de l’ouverture sociale. De gauche à droite : Pierre Mathiot secrétaire de la CGE, Anne-Lucie Wack présidente, Alice Guilhon présidente du Chapitre des écoles de management, Boris Walbaum co-président de l’association Article 1, Luc Vidal consultant indépendant, Chantal Dardelet animatrice du Groupe de travail ouverture sociale et directrice du Centre égalité des chances de l’ESSEC et Sophie Commereuc présidente de la Commission grandes écoles et territoires

Les grandes écoles, bonnes élèves de l’ouverture sociale ?

La moitié des grandes écoles comptent au moins 30 % d’étudiants répondant aux critères sociaux. Un des chiffres marquants de la seconde édition du Baromètre de l’ouverture sociale dans les grandes écoles dévoilée le 4 décembre 2019 par la Conférence des Grandes Ecoles (CGE). L’occasion de dresser le panorama de l’ouverture sociale dans les écoles de la CGE.

 

« Si les inégalités prennent leurs sources très tôt dans la chaîne éducative, l’ouverture sociale est un enjeu majeur dans les grandes écoles et les universités. Il nous appartient de diminuer les biais sociaux », introduit Anne-Lucie Wack, présidente de la CGE. Car trois enjeux majeurs se jouent. L’équité dans l’accès aux études supérieures bien sûr, mais aussi l’intérêt collectif qui demande de puiser les talents dans toute la société et enfin, la diversité au sein du leadership de demain.  

Consciente de ces enjeux, la CGE s’est d’ailleurs emparée de la question il y a une quinzaine d’années avec la création d’un groupe de travail dédié à l’ouverture sociale. Celui-ci compte aujourd’hui plus de 300 membres : grandes écoles bien sûr, mais aussi associations, fondations, universités, pouvoirs publics…

Un nouvel indicateur de l’ouverture sociale

Auteur d’un premier livre blanc en 2010 (qui sera réédité en 2020), ce groupe de travail est aussi à l’origine du Baromètre de l’ouverture sociale, dont la seconde édition inaugure un nouvel indicateur : les ERCS pour Etudiants Répondant aux Critères Sociaux. Un indicateur qui englobe les boursiers CROUS, mais aussi les étudiants répondant à ces critères mais ne bénéficiant pas ou plus de bourse CROUS (apprentis, contrats pro, étudiants rémunérés ou allocataires de bourses sociales spécifiques notamment).

Des chiffres encourageants

Selon ce nouvel indicateur, la moitié des écoles de la CGE comptent au moins 30 % d’étudiants répondant aux critères sociaux, soit + 3 % par rapport à 2015. Des chiffres en progression mais… pas partout. Ils varient en effet de 8 à 55 % selon les établissements. «  A l’université le taux est de 42 % en moyenne en premier cycle et de 31 % en second cycle. En pourcentages, il y a donc plus de boursiers dans les grandes écoles qu’en 2nd cycle universitaire », précise Pierre Mathiot, secrétaire de la CGE.  

Ouverture sociale, les écoles se donnent les moyens

Avec 300 000 € alloués en moyenne par chaque école aux programmes dédiés à l’ouverture sociale (soit + 100 000 euros par rapport à 2015), les écoles augmentent drastiquement leur budget sur ce sujet. Des moyens financiers mais aussi humains : 1.6 équivalent temps plein se consacre aujourd’hui à ces questions. « 52 % des écoles disposent d’une structure dédiée à ces sujets », précise Chantal Dardelet, animatrice du groupe de travail ouverture sociale et directrice du Centre égalité des chances de l’ESSEC.

Un budget en hausse, mais pour quelles actions ?

#1 Accompagner les collégiens et lycéens vers les études supérieures. 78 % des écoles s’engagent via des programmes visant à démystifier les grandes écoles, lutter contre l’autocensure et accompagner la construction d’un projet professionnel. « Car la réussite à un concours répond à 3 facteurs : le mérite individuel, la chance et le mérite hérité. C’est ce dernier critère qui est au cœur de nos enjeux » rappelle Sophie Commereuc, présidente de la Commission grandes écoles et territoires.

#2 Diversifier le recrutement dans les grandes écoles, avec 56 % des écoles engagées. « Qui s’inscrit à la course : voilà le problème central. Car lorsqu’ils sont admis dans nos écoles, les étudiants répondant aux critères sociaux réussissent aussi, si ce n’est mieux, que les autres. La question fondamentale c’est comment augmenter le nombre de candidats », constate Pierre Mathiot.

#3 Accompagner ces jeunes pendant les études. 81% des écoles ont mis en place des dispositifs à destination des étudiants issus de milieux populaires (aide financière, tutorat académique, accompagnement dans la recherche d’apprentissages ou de stages…).

#4 Développer la conscience sociale des étudiants pour outiller toute la communauté estudiantine sur les questions de diversité.

Et avec quel impact ?

Des dispositifs qui semblent porter leurs fruits : 1 400 collégiens et lycéens sont tutorés par école chaque année et 90 % des écoles reconnaissent l’engagement de leurs étudiants-tuteurs dans les cursus. « C’est du win – win ! » insiste Chantal Dardelet.  Du côté des étudiants en formation, « 260 000 € de bourses sur critères sociaux sont redistribués par école chaque année », rappelle Anne-Lucie Wack. Soit une augmentation de 60 000 € depuis 2015.

Et demain ?

« 100 000 collégiens et lycéens sont encore tutorés aujourd’hui : laissons leur le temps d’arriver dans nos écoles. L’impact à venir est fort ! » annonce Chantal Dardelet. Du côté du tutorat, s’il s’est d’abord concentré sur les quartiers populaires, les territoires isolés commencent également à être adressés aujourd’hui. Autres pistes de progression : « la réforme du Bac qui va faire évoluer les profils des candidats. Faisons en un vrai dispositif d’ouverture sociale car nos écoles, comme les entreprises, ont besoin de diversité », conclut la présidente de la CGE.