Ingénieurs et Scientifiques de France (IESF) a dévoilé hier sa 27è enquête socio-professionnelle sur la situation des ingénieurs. Près de 55 000 réponses ont été recueillies auprès de 125 associations d’alumni qui ont invité leurs membres à participer à cette enquête devenue référence pour la profession. Coup de projecteur sur les grandes tendances de l’enquête développées par François Lureau, Président d’IESF et Gérard Duwat, Président de l’Observatoire des Ingénieurs.
Une féminisation grandissante
Près d’1 million d’ingénieurs et 20.5 % de femmes. Si la parité est encore loin d’être atteinte dans la profession, la progression est nette. En effet, alors que seulement 5 % des diplômés en 1973 et 10 % des diplômées en 1980 étaient des femmes, elles représentent 29 % de la promo 2015. On estime aujourd’hui qu’1 femme sur 34 deviendra ingénieure contre 1 sur 500 pour la génération arrivant à la retraite. A noter que de nombreux secteurs restent marqués par des stéréotypes de genre : si l’agro-alimentaire et la chimie sont toujours dominés par les femmes, la mécanique et les STIC sont encore dominés par les hommes. De même, si l’écart salarial entre les hommes et les femmes diminue, il s’élève encore à 14 % en moyenne (6 % pour les moins de 30 ans).
Le boom de l’entrepreneuriat
Une volonté d’entreprendre s’affirme chez les ingénieurs. Ainsi, 18 % d’entre eux ont déjà créé ou repris une entreprise. Une tendance encouragée par des formations plus adaptées : 26 % des moins de 30 ans considèrent qu’ils ont été préparés à créer une entreprise durant leurs études (ils ne sont que 17 % des 30-39 ans et 7 % des 40-49 ans). Poussée par cette dynamique, l’autoentreprise a d’ailleurs le vent en poupe chez les ingénieurs qui sont aujourd’hui 19 000 à avoir fait le choix de ce statut pour mettre en premier pas dans l’entrepreneuriat (plus de la moitié exerce par ailleurs une activité principale salariée). Un mouvement qui s’accompagne d’une forte évolution du modèle du « salariat classique ». 80 000 ingénieurs déclarent en effet exercer une activité non-salariée (chef d’entreprise, gérant de société, indépendant, profession libérale…). « On détecte un esprit d’indépendance et une réelle aptitude à se lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat », note Gérard Duwat.
Le rôle des consultants et des sociétés de service
Une dynamique qui va de pair avec le développement des activités des sociétés de service. En effet, les entreprises font de plus en plus appel à des services extérieurs pour conduire les grandes transformations qui s’ouvrent à eux, celle du numérique en particulier. Ainsi, 100 000 ingénieurs se déclarent aujourd’hui « consultants », un terme regroupant de nombreuses pratiques (indépendant, société de service et cabinet de conseil). Les emplois indirects prennent donc une place grandissante dans l’emploi des ingénieurs : ils représentent aujourd’hui 10 % de l’emploi global. « Emplois directs et indirects sont des mondes qui ne s’opposent pas mais qui se complètent » insiste Gérard Duwat. Une dynamique qui permet à la profession de s’inscrire dans un équilibre certain entre offre et demande. « Même si certains profils comme le chef d’étude peinent à être recrutés », ajoute François Lureau.
Zoom sur les doctorants
Près de 16 % des ingénieurs ont continué leurs études après l’obtention de leur diplôme en 2015, soit une augmentation estimée à 17 % par rapport à 2014. Un chiffre significatif lorsqu’on voit qu’ils ne sont que 5 % à tenter l’aventure du doctorat en école de commerce.
Prêts pour la révolution numérique ?
Si les ingénieurs ont toujours fait de l’innovation une priorité, l’enquête pointe cette année du doigt leur prise de conscience quant à l’incroyable révolution qui les attend. « Les ingénieurs sont depuis toujours des acteurs importants du développement numérique et des progrès qu’il engendre. Mais alors que depuis 50 ans ces progrès se sont fait de manière continue, nous sommes aujourd’hui dans une situation de rupture qui confronte les ingénieurs à des défis considérables. Preuve de cette prise de conscience, une des premières décisions d’Isabelle Kocher lors de sa prise de fonction à la tête d’ENGIE a été d’annoncer 1.5 milliard d’investissements dans la révolution numérique », insiste Gérard Duwat.
La figure de l’ingénieur citoyen
L’enquête pointe enfin du doigt l’engagement de plus en plus fort des ingénieurs dans la vie politique et associative. Ils se déclarent en effet plus sensibles aux enjeux de la société, aux responsabilités sociales et environnementales et montrent une volonté d’engagement plus importante : 38 % ont une activité associative et 6% une activité politique ou syndicale.
Les chiffres à retenir
1 million d’ingénieurs
38 000 nouveaux diplômés
1 ingénieur sur 6 travaille à l’étranger
Salaire médian : 56 000 €/an (17 % de plus que le salaire médian des cadres)
34 000 € de salaire en début de carrière
57 % des ingénieurs perçoivent une part variable dans leur salaire (47 % en 2013)
302 100 ingénieurs dans l’industrie (39 % des ingénieurs en poste)
Seulement 3.1 % de chômage (3 fois moins que la moyenne nationale)
18 % d’entrepreneurs (dont 19 000 autoentrepreneurs)
17 000 ingénieurs préparaient une thèse en 2015
100 000 ingénieurs – consultants
Par Clarisse Watine