Sylvie Deffayet, directrice de la Chaire leadership et compétences managériales de l’EDHEC Business School étudie depuis des années les fondements de l’autorité managériale, la réalité (ou non) d’une révolution managériale dans les entreprises en réponse à de nouvelles attentes. Attention secret : elle nous révèle qui sont les managers accomplis et reconnus ! – Par Ariane Despierres-Féry
Comment est qualifié le manager qui réussit actuellement ?
Le jargon actuel souligne son agilité, sa capacité à être acteur du développement permanent de sa self-leadership agility. Dans les faits, ce manager n’attend pas uniquement des directives venues d’en haut ou un plan stratégique pour agir. Il a confiance en sa capacité à chercher les ressources chez lui et chez les autres.
Surtout, il ose s’ouvrir de ses interrogations aux autres managers, il apprend des situations plus que des livres ou des formations sur le leadership. Il s’interroge sur ses problématiques managériales. Il prend le temps d’identifier les problèmes et les compétences à mobiliser pour y répondre. Il se met en mode réflexif, apprend des situations pour penser le coup d’après.
Vous parlez aussi de servant leader, qui est-il ?
Cette notion académique décrit le leader derrière son équipe, cherchant à faire émerger les talents et compétences. Il fait preuve d’humilité et de simplicité dans sa relation à ses collaborateurs. Il réalise quatre gestes managériaux qui ne sont pas traditionnellement rattachés aux chefs : demander, recevoir, donner et rendre. Jean-Edouard Grésy et Alain Caillé, anthropologues et sociologues, ont décrit ces gestes tellement nécessaires à l’entreprise collaborative et dont les managers peuvent être les modèles (in La révolution du don – Seuil 2014). « Demander, recevoir, donner et rendre. Le manager à succès a adopté cette posture »
En quoi cette posture est-elle nouvelle ?
Elle répond à la grande complexité des problématiques du monde des affaires. Même au plus haut niveau, la gouvernance n’a pas toutes les réponses, idées et solutions. Dans ce contexte, les dirigeants doivent faire le deuil de certaines postures. Partager et s’ouvrir n’est pas si évident. Cela suppose de céder le pouvoir. Il leur faut admettre que plus ils partagent, plus ils sont puissants et efficaces ; que le pouvoir partagé ne réduit pas pour autant le pouvoir du manager. Cela renverse leurs croyances.
Quels sont les prérequis pour réussir son néo-management ?
• Deux clés pour mener cette révolution :
-une culture d’entreprise autorisant ces comportements – l’usage et l’intégration des outils collaboratifs.
• Dans ce modèle :
– les managers retrouvent du pouvoir d’agir – ils deviennent les artisans de leur propre espace pour inventer et prendre de l’autonomie – ils dessinent leur propre équilibre entre les lieux de contrôle externes (la directive venue d’en haut) et interne (je peux imaginer une solution tenant compte de la contrainte et l’activer).