Conception et garantie des charges nucléaires, lutte contre la prolifération nucléaire et le terrorisme, ingénierie nucléaire ou maîtrise d’ouvrage des chaufferies nucléaires embarquées : le CEA DAM Île-de-France et son programme Simulation ne manquent pas d’atouts pour séduire de jeunes ingénieurs passionnés d’IA, de big data et de quantique. Explications avec Jean-Philippe Verger (CentraleSupélec 93), Directeur de ce site rattaché à la Direction des applications militaires (DAM) du Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA).
Le CEA DAM Île-de-France : le fer de lance de la dissuasion française ?
Le centre conçoit les charges nucléaires des armes de la dissuasion et garantit leur sûreté et leur fiabilité, en s’appuyant sur le programme Simulation. Il met son expertise technique au service des autorités dans la lutte contre la prolifération nucléaire et le terrorisme et les alertes en cas de séisme, de tsunami ou d’essai nucléaire étranger. Parallèlement, il assure l’ingénierie des infrastructures nucléaires complexes de la DAM, de leur conception jusqu’à leur démantèlement. Autre point très important, il codéveloppe avec Eviden les supercalculateurs, au meilleur niveau mondial, qu’il exploite pour sa mission Défense. Enfin, il est aussi responsable d’une Installation Nucléaire qui abrite les moyens d’essais et les fabrications des cœurs de la propulsion nucléaire au CEA de Cadarache.
Vous êtes un peu le miroir de cette institution.
En effet, cela fait 30 ans que je suis salarié du CEA DAM. Et même 31, puisque j’y ai effectué mon service militaire ! Depuis le premier jour, la passion et l’enthousiasme demeurent intacts car le centre offre des parcours d’une immense variété pour les ingénieurs et les chercheurs. Après l’arrêt des essais nucléaires français en 1996, j’ai activement participé à l’avènement du programme Simulation. Nous avons inventé une nouvelle façon de concevoir et de garantir nos charges nucléaires en misant sur la simulation et son potentiel illimité.
Quels sont vos défis à la tête du centre ?
Ce contexte international mouvant ne fait que renforcer la nécessité d’avoir une dissuasion au meilleur niveau, capable de s’adapter à des menaces grandissantes. En ce sens, les grands instruments conçus et mis en place par le CEA – tels que le supercalculateur EXA 1 (avec Eviden), l’installation de recherche franco-britannique EPURE et le Laser Mégajoule – arrivent à leur pleine capacité. Mais nous ne devons pas pour autant nous reposer sur nos lauriers ! La marge de progression du programme Simulation est encore énorme grâce à aux calculateurs dopés aux GPU et aux premiers démonstrateurs quantiques.
Quid des opportunités pour les jeunes ingénieurs ?
De nombreux stagiaires, alternants, doctorants, postdocs et jeunes dip’ intègrent chaque année notre environnement de travail exceptionnel. Nos supercalculateurs sont les plus puissants d’Europe et stimulent, de facto, la réflexion des chercheurs et l’intérêt des ingénieurs passionnés d’IA, de big data et de quantique. Nous accueillons également des profils commerciaux appelés à piloter des contrats complexes portant sur la refonte des installations nucléaires de la DAM ainsi que des ingénieurs généralistes attirés par le management.
Quel regard portez-vous sur votre cursus à CentraleSupélec ?
Dans les années 90, la pluridisciplinarité de CentraleSupélec permettait déjà de construire des parcours très variés dès la troisième année. La qualité des enseignants m’a aussi marqué avec une mention particulière pour mes professeurs de mécanique quantique et de mécanique des fluides. J’ai d’ailleurs reçu ce dernier, membre de l’Académie des Sciences, avec beaucoup d’émotion sur le centre 20 ans plus tard. Par ailleurs, la section Voile m’a appris l’esprit d’équipe et offert une première approche du management des hommes et des projets via la recherche de financements indispensables pour pouvoir participer à de grandes courses nationales.
L’expérience qui a tout changé dans votre vie.
Sans aucun doute, mon service militaire réalisé au CEA DAM Île-de-France. Auparavant, je me projetais vers une carrière d’ingénieur dans la prospection pétrolière. Mais après quelques semaines passées dans le monde de la dissuasion – au contact des missions très spécifiques de la DAM – j’ai décidé de ne plus quitter cette trajectoire. Cet univers suscite assurément des vocations !
Contact : communicationdif@cea.fr