Diplômé de l’EM Normandie en 96, initiateur d’une association d’alumni ressuscitée par l’institutionnalisation de la cotisation à vie, serial entrepreneur, ancien directeur du développement, membre du Comex et directeur général de l’école depuis le 1er février 2020 : Elian PIlvin a l’EM Normandie dans le sang ! Quelques semaines seulement après sa nomination, il répond sans langue de bois aux questions posées par trois élèves de l’école à l’occasion d’un déjeuner animé.
Alexandre Chiabai en 3A du PGE et incubé au sein de l’Institut de l’Innovation et du Développement de l’Entrepreneuriat, Charline Laffra, en 4A du PGE inscrite au Track Strategy and Consulting et Marine Lemonnier, en 4A du PGE en alternance, ont relevé le défi lancé par la rédac : poser leurs questions au nouveau directeur de leur école. Ses souvenirs d’étudiant, ses conseils d’ancien chef d’entreprise, les actus de l’école, la concurrence féroce qui règne au pays des business schools… tous les sujets ont été abordés. Morceaux choisis.
Le nouveau campus du Havre va bientôt ouvrir ses portes : il ressemblera à quoi ?
Son ouverture coïncide avec les 150 ans de l’école, que nous fêterons au Havre. A la rentrée, vous pourrez arpenter un tout nouveau campus avec vue sur la mer. Un bâtiment extraordinaire avec un look d’enfer ! Un lieu digitalisé, propice aux rencontres et aux nouveaux usages pédagogiques.
Plusieurs campus = plusieurs niveaux ?
La légende urbaine a pu circuler en effet. Notamment en raison de l’absence de correction mélangée lors des partiels. Mais aujourd’hui, l’alignement est total : tous les étudiants, quel que soit leur campus, passent les mêmes partiels, le même jour, à la même heure et la correction est assurée par l’ensemble des professeurs.
Paris va-t-il finir par manger le Havre et Caen ?
Nous avons ouvert le campus parisien en 2015 pour nous aligner sur le positionnement de nos deux principales concurrentes (l’IESEG et l’ESSCA) déjà présentes dans la capitale. Il s’est bien développé depuis, mais il n’a pas vocation à tuer Caen et Le Havre ! A l’origine focus alternance, j’ai milité pour qu’on y propose l’ensemble de nos formations, PGE compris. Pourquoi ? Pour ne pas s’éloigner du « robinet » des étudiants qui alimentent les grandes écoles françaises, essentiellement basés en Ile-de-France.
Il y aura donc bientôt un nouveau campus parisien ?
Les locaux de Ranelagh ne sont pas extensibles et nous avons effectivement besoin d’un peu de respiration. Notre objectif ? Que l’école dispose, à horizon 6 ans, d’un nouveau campus conçu selon l’évolution de ses modèles pédagogiques. Un campus dans Paris intramuros et plus précisément dans l’ouest parisien. Nous sommes une école normande, installer notre campus à la Porte de Vincennes n’aurait aucun sens.
Et à l’international ?
L’école doit encore accroître sa dimension internationale mais nous savons faire de l’international. Notre campus d’Oxford en est la preuve. Nous avons aussi dans les cartons deux autres campus hors d’Europe. En Amérique et en Asie, quelque part entre le Moyen-Orient et le Japon.
On parle beaucoup de fusions entre certaines grandes écoles, qu’en pensez-vous ?
Les écoles se draguent. Si nous pouvons monter des projets communs, il n’est pas question de fusionner aujourd’hui. Mais il est important d’avoir une lecture claire du champ concurrentiel des business schools en France et à l’international pour savoir se différencier. Nous sommes ainsi la seule école double accréditée avec autant d’entrées menant à un M2 PGE. Un grade de master, identique à celui que vous avez en sortant de HEC, de KEDGE BS ou de NEOMA BS.
Alors pourquoi l’EM Normandie n’est-elle pas au même niveau que ces écoles dans les classements ?
Les classements sont loin de répondre à une science exacte. S’ils permettent aux écoles d’être extrêmement visibles ils restent à prendre avec des pincettes. La première fois que l’EM Normandie a figuré dans un classement, elle était 36e sur 42. Aujourd’hui, sa position naturelle la place entre la 15e et la 20e place des écoles post-prépa classées sur leur Programme Grande Ecole. En revanche, je porte une attention particulière aux classements empiriques, faisant appel à une méthodologie quanti, comme le FT et le QS. Les anglo-saxons sont très pragmatiques : ils prennent des chiffres et comparent ce qui est comparable. Et dans ces classements nous faisons partie des 100 meilleures business schools au monde au niveau master.
C’est quoi le plus de l’EM ?
Pour être visible, il faut être premier quelque part. La prime au leader a un effet de catalyse stratégique pour attirer les étudiants. Et premiers, nous le sommes sur l’alternance. La preuve : 54 % de nos étudiants de M1 sont alternants. Nous sommes aussi dans le Top 3 des écoles post bac en 5 ans et je veux m’appuyer sur ce leadership pour devenir un modèle alternatif fort, au national, comme à l’international.
Vos années d’étudiant à l’EM Normandie, c’était comment ?
Je suis entré à l’école en 93. J’ai fait mes deux premières années au Havre car le PGE y était attaché, puis j’ai suivi un semestre académique en Allemagne au fin fond de la Bavière : 120 000 étudiants dans une ville de 130 000 personnes, quel souvenir ! J’ai ensuite fait mon deuxième semestre en majeure finance à Caen.
Vous en avez aussi profité pour créer votre entreprise ?
Quand je suis entré à l’école, je n’avais pas de projet d’entreprise… et pourtant j’en ai créé une ! La culture techno est entrée en France à la fin des années 80 via la Normandie. J’ai commencé à organiser des rave party au Havre et mi-94, les choses ont commencé à prendre de l’ampleur. Mes parents m’ont alors fait comprendre que ce serait mieux de structurer un peu mon activité ! J’ai donc créé une boite avec mon ami d’enfance. En 96, nous avons changé de modèle économique. C’était le début de la grande époque du DJing, nous avions un gros réseau de DJ nationaux et internationaux et en avons profité pour monter une entreprise de location / vente de matériels sono. Nous avons ensuite recruté une trentaine de collaborateurs et avons même pu monter jusqu’à 100 personnes, intermittents compris.
Vous avez fait un EMBA à HEC en 2012 : pourquoi ?
Après avoir vendu ma société, je suis passé en 15 jours d’une activité ultra intense, à des journées où le téléphone ne sonnait presque plus. J’avais 36 ans et je me suis dit que ça allait être compliqué à gérer. J’ai eu l’occasion de repartir sur les bancs de l’école et je l’ai saisie. Mon entreprise s’était faite au feeling et cet EMBA me permettait de repartir sur les fondamentaux, sur l’état de l’art de la finance.
C’était extra et je crois que je n’ai jamais autant bossé de ma vie !
Un moment clé de votre carrière ?
Il y en a eu plusieurs, mais le premier c’est sans doute lorsque mon père m’a dit de monter ma boite pour faire entrer notre activité, encore un peu alternative, dans les clous !
Votre conseil à un étudiant – entrepreneur justement ?
Monte ta boite le plus tôt possible. A 21 ans, on a tout à construire et on peut sans problème travailler H24. Plus on commence tôt, plus on commet d’erreurs et c’est une bonne chose : start fast, fail fast, go fast ! Si tu as déjà créé ton entreprise, ne suis pas un master en création d’entreprise. Focalise-toi plutôt sur tes points faibles pour combler tes lacunes. Sors de ta zone de confort sans pour autant te mettre en danger. Sauter à l’élastique ce n’est pas sauter dans le vide !