30 filières en management, 1 000 diplômes d’Etat et près de 500 000 diplômés depuis leur création en 1955 : les IAE constituent une des plus grandes communautés françaises en sciences de gestion et management. Mais quelles sont les spécificités de ce modèle d’écoles universitaires de management ? Explications d’Éric Lamarque, président d’IAE France et d’IAE Paris-Sorbonne.
Les IAE sont des écoles universitaires : qu’est-ce que cela implique ?
Cela signifie que nous sommes attachés aux fondamentaux de l’excellence universitaire, tout en proposant une expérience étudiante riche, sans pour autant tomber dans du pur service clientéliste. Ce modèle permet aux étudiants d’être associés à une entité commune moins vaste qu’une très grande université et donc, de créer une solidarité et un attachement plus forts entre étudiants et alumni. Autre atout du modèle : sa façon d’associer enseignement académique et professionnel. Les IAE répondent aux besoins des entreprises, mais pas au détriment du travail universitaire sur les fondamentaux. Chez nous, les hard skills ne sont pas reléguées au second plan ! Enfin, les IAE sont, par nature, des écoles de la diversité. Pour preuve, nous comptons 35 % de boursiers dans nos effectifs et nos promotions sont recrutées sur nos territoires d’implantation, paritaires et d’origine sociales diverses.
Les IAE : des lieux de recherche de pointe en gestion et management ?
C’est même dans notre ADN universitaire : nous n’avons pas créé des laboratoires de recherche pour satisfaire les accréditeurs internationaux ! Notre recherche s’opère soit en management pur, soit en lien avec d’autres disciplines comme l’économie par exemple. Nous demandons à nos étudiants de réaliser un mémoire avec une dimension académique très forte, qui incarne leur regard critique, leur capacité à analyser l’état de l’art bibliographique et à toucher du doigt le raisonnement scientifique universitaire. Notre objectif ? Instiller, par la recherche, cette culture du regard critique et du doute sur les pratiques du management.
Les IAE ont récemment déclaré que les étudiants titulaires d’un bachelor d’une école privée ne sont pas complètement préparés pour suivre normalement des programmes de master d’un IAE sur de nombreux aspects. Pourquoi ?
Nous avons simplement rappelé que les profils BUT et Bachelor – qui sont des formations professionnalisantes – ne sont pas ceux que nous recrutons prioritairement en master. Être titulaire d’une Licence universitaire de Paris 1 ou d’un Bachelor d’une école privée, non, ce n’est pas la même chose. Les IAE ne vont pas changer le contenu de leurs masters pour se caler sur ces profils différents – ce qui ne veut pas dire inférieurs- qui ont été formés dans le but de se professionnaliser pour entrer rapidement sur le marché du travail. Les IAE encouragent un équilibre entre la professionnalisation et les compétences académiques de réflexion et de vision, indispensables aux managers.
Mais alors, quelles sont les « cases à cocher » pour rejoindre un IAE ?
Les IAE sont des formations très sélectives. En complément d’un bon dossier académique, le Score IAE- Message permet d’attester d’un certain niveau. Il s’agit d’un test de 400 questions portant sur quatre domaines (raisonnement logique, français, anglais et culture générale), valable trois ans. Nous cherchons aussi des candidats pour lesquels les notions de mérite et d’intérêt général sont fortes : on veut de la sincérité et pas des intérêts calculés !
L’alternance : les IAE n’ont pas attendu la tendance ?
Ils n’ont effectivement pas attendu que l’alternance explose pour s’y engager. A titre d’exemple, IAE Paris-Sorbonne a créé son CFA il y a plus de 20 ans et aujourd’hui, entre 50 et 90 % des étudiants des IAE choisissent l’alternance. Une voie parfaitement en adéquation avec notre modèle équilibré entre professionnalisation, acquisition de connaissances académiques à haut niveau et prise de recul.
Un Groupe, des ambitions : zoom sur les IAE – L’interview d’Éric Lamarque
A la tête de l’IAE Paris Sorbonne Business School et du Réseau IAE France, Éric Lamarque voit dans ce modèle de formation unique « un créateur reconnu de valeur globale pour ses parties prenantes, ses territoires et la société. » Il revient sur les vertus de ce modèle pour les étudiants et la performance des entreprises françaises et internationales qui les accueillent. Enquête réalisée en 2022
Comment définir le Réseau IAE France ?
C’est le réseau des écoles universitaires de management. Il rassemble des écoles accessibles, sans droits d’inscription prohibitifs, à même d’accueillir des gens aux parcours variés (AES, droit, économie-gestion, IUT etc) et très bien formés sur le fond. Car sans des connaissances fondamentales extrêmement solides, on ne pourra pas faire face à l’incertitude d’un monde aussi complexe que celui d’aujourd’hui. Au quotidien, nous essayons aussi d’inculquer à nos étudiants des valeurs autour de l’humilité et de la retenue ce que, à mon avis, ne font pas toutes les écoles « classiques ».
Ce réseau rassemble 36 IAE, 30 filières en management et 1 000 diplômes d’Etat. Qu’est-ce qui fédère une telle diversité ?
D’abord, le partage des bonnes pratiques. Ensuite, les synergies, qui nous permettent notamment de passer des accords internationaux. Cela nous a ainsi permis par exemple, de donner accès à tous les étudiants des IAE à l’Université McGill, ou encore de donner la possibilité à tous les IAE de participer à des forums internationaux sur un stand « IAE France ». Cela ouvre également les portes au développement des mobilités des professeurs entre les IAE. Car ils constituent quand même un réseau d’experts universitaires équivalent à la moitié des professeurs en gestion en France ! De fait, ce réseau ne s’inscrit pas dans une logique de concurrence mais bien d’émulation.
Deux actus du réseau qui vont faire le buzz ?
Je pense évidemment à l’augmentation de la taille du réseau, avec quatre candidatures en gestation. Les discussions sont avancées à St Etienne, Reims, en Haute Alsace et aux Antilles. Car de plus en plus de présidents d’université considèrent que disposer d’une école universitaire de management est un moyen de bien se positionner face à la prolifération du secteur privé. Autre projet important : l’appui des IAE auprès de l’Education Nationale dans le cadre de la création des Ecoles académiques de la formation continue. Nous sommes sollicités pour les appuyer sur le volet management et ainsi aider nos collègues de l’Education Nationale à se familiariser avec la gestion d’équipe, la gestion de crise etc. Cela, selon des dispositifs co-construits, comme nous le faisons avec tous nos partenaires. Dans cette même dynamique, nous avons aussi répondu à un appel d’offre du ministère de l’Intérieur sur la formation des préfets sur ces sujets.
Les skills des diplômés des IAE qui font toute la différence aux yeux des recruteurs ?
Ils font tous le même constat : avec un IAE ça ne sera peut-être pas toujours flamboyant mais ça sera toujours carré ! Car nos diplômés sont clairement au niveau du Top 10 des écoles de commerce et chez nous, on ne va pas à la facilité.
Je suis accepté dans un IAE : pourquoi suis-je certain de faire le bon choix ?
Les IAE proposent un bon mix entre savoir académique et professionnel. A l’IAE Paris Sorbonne Business School que je dirige par exemple, tous nos enseignants ont eu une expérience professionnelle, ce qui est très important : avoir été en position de décision oblige forcément à enseigner différemment. Les IAE sont aussi des établissements qui accompagnent plus les étudiants qu’à l’université « classique ». Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si nous avons été classés N°3 par l’Happy Index® At School 2022 il y a quelques semaines, alors même que nous avons un taux de sélectivité très fort. C’est également un bon choix car dans les IAE, on reste bien sur nos hard skills… empaquetées dans les soft skills, et pas l’inverse ! Notre modèle démontre qu’on peut proposer aux étudiants l’équivalent, voire mieux, qu’une école, à moindre prix pour la formation continue et presque gratuitement pour les autres formations.
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A la tête de l’IAE Paris Sorbonne Business School et d’IAE France après une carrière vouée à l’enseignement supérieur, Eric Lamarque, « pur produit IAE » partage « son » IAE. Ses fiertés de directeur et les pépites du campus : il nous raconte son histoire avec l’institution.
Mon engagement pour le modèle IAE
Les IAE n’ont rien à envier aux meilleurs établissements supérieurs de gestion privés ! D’abord, parce que nos cours, nos méthodes et nos pédagogies sont au même niveau, tout comme l’insertion professionnelle et les rémunérations de nos diplômés. Si les écoles restent devant nous en matière de quantité et de diversité d’accords internationaux, les IAE n’ont pas pour autant à rougir de leurs accords, certes moins nombreux, mais de grande qualité, comme avec McGill par exemple. D’autant plus que grâce à IAE France, l’ensemble de nos étudiants peuvent bénéficier de tous les accords internationaux noués par le réseau. A part si vous êtes admis dans une Parisienne, je ne vois pas d’intérêt majeur à dépenser 35 à 40 K€ dans une école. Oui nous avons moins de moyens, oui nous communiquons moins, mais nous avons un niveau de qualité équivalent à un grand nombre d’écoles… à effectif moindre.
Mon regard sur la sélectivité
De fait, la sélectivité des IAE est pleinement assumée. Les IAE acceptent 25 % des candidats, voir même 10 à 12 % pour certains diplômes de l’IAE Paris Sorbonne BS. La gestion n’est pas forcément une discipline universitaire à même de jouir de la réallocation de moyens qui permettrait d’accueillir plus de candidats. Mais, si demain on me dit que j’ai deux fois plus de places et deux fois plus de professeurs, je prends tout de suite deux fois plus d’étudiants !
Mes fiertés pour la communauté IAE
Je suis fier, bien sûr, de la façon dont les IAE ont passé cette année si particulière. Dès le 15 mars, tous nos cours sont passés en ligne, sans aucune interruption. Cette période a aussi permis de montrer que le conservatisme associé à l’image universitaire (qui reste vrai dans certaines disciplines) n’est pas et ne doit pas être associé aux IAE.
Mon engagement pour le collectif
J’ai depuis toujours plus l’esprit de coopération que l’esprit de compétition, qui n’est pas l’idée que je me fais de l’enseignement supérieur public. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai toujours refusé les classements des IAE : dire que HEC est meilleure que l’IAE Brest, ce n’est pas un exploit retentissant ! Je suis partisan d’une approche collaborative qui permet à chacun de profiter des atouts du réseau. Car chaque IAE est ancré sur son territoire et sur quelques sujets d’excellence qui le rendent visible au national et à l’international, et peut donc bénéficier au rayonnement de tous.
Les pépites IAE Paris Sorbonne BS à ne pas rater
Je pense d’abord bien sûr à notre positionnement sur l’alternance (90 % de nos étudiants sont alternants), une voie qui permet de combiner excellence académique et professionnalisation, et donc particulièrement vertueuse dans cette période. Ensuite, parce que les IAE doivent répondre aux problématiques sociétales du moment, je citerais notre formation au management de la QSE (lancée en 2018 et qui connait depuis un succès grandissant) et notre formation à la supply chain. Nous n’avons pas attendu la Covid pour la considérer comme le nerf de la guerre ! Autre axe de réflexion pour les prochains mois : le management des risques comme driver de l’entreprise.
Mon endroit préféré sur le campus
Le Grand Amphi de la Sorbonne ! Pour moi qui viens d’un village gersois de 200 habitants, ça reste un lieu extraordinaire. Lorsque je reçois des homologues américains, russes ou chinois, c’est un passage obligé : ils ne voient ça nulle part ailleurs. C’est un environnement qui oblige tout le monde à être bon : on ne peut pas être là sans vouloir donner le meilleur de soi. Recevoir son diplôme dans un tel cadre, comme c’est le cas de tous nos étudiants, c’est vraiment être au cœur de ce qui fait la grandeur de la Sorbonne.