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Qu’attendent les étudiants des grandes écoles du prochain Président de la République ?

Pour certains, ce sera leur première élection présidentielle en tant qu’électeurs. Et après deux années d’une crise sanitaire qui a particulièrement impacté leur vie, les étudiants des grandes écoles veulent faire entendre leur voix. Environnement, études, égalité femmes-hommes ou encore relation avec l’international…. A deux mois des Présidentielles, nous leur avons demandé ce qu’ils attendaient du prochain Président de la République.

Antoine Hauser, étudiant ingénieur en master 1 à CentraleSupélec et président de l’association Symposium, tribune étudiante de l’école 

C’est avec un sentiment d’abandon que j’écris ces lignes, un abandon d’une jeunesse qu’on n’écoute pas, et à qui on laisse un futur terrifiant.

Du président qui sera élu en 2022, j’attends une réelle écoute, une véritable attention portée aux étudiants. Il est vrai que nous ne votons pas tous, que nous ne sommes pas les plus actifs dans les débats publics et que nous sommes les derniers à remettre en question les décisions qui ne nous impactent pas directement. Mais ce sont elles qui détermineront notre futur.

J’attends aussi une meilleure prise en compte de l’avis des scientifiques. Aujourd’hui entre Covid et changement climatique, les sciences n’ont jamais autant été au centre des discussions. Pourtant, malgré les alertes lancées par les chercheurs du monde entier, la classe politique peine à mettre en place de réelles mesures pour endiguer ces crises qui touchent déjà tout particulièrement les étudiants.

Heureusement, j’observe qu’autour de moi, les étudiants commencent à porter leur voix, et les politiques nous entendent, mais il faut maintenant nous écouter.

Eliot Duron, étudiant en 2è année du PGE à GEM et rédacteur pour l’association Savoir Oser la Solidarité

En tant qu’étudiants en grande école en 2021, les Présidentielles de 2022 sont pour beaucoup d’entre nous les premières élections présidentielles auxquelles nous allons pouvoir participer au travers du vote.

La dernière décennie a été marquée par une augmentation exorbitante des frais de scolarité des grandes écoles, et plus particulièrement des écoles de commerce. En 2009, il fallait débourser environ 29 000 € pour suivre un parcours PGE en école de commerce. En l’espace de dix ans, les frais de scolarité ont augmenté de près de 75 %, passant à plus de 40 000 € pour trois années de scolarité.

Ceci s’explique notamment par le désengagement des CCI dans les subventions accordées aux grandes écoles, en grande partie causé par des réductions significatives de la part de l’État. Bien que peu d’écoles aient suivi cette démarche, de nombreux observateurs s’inquiètent de voir les grandes écoles devenir un moyen pour des investisseurs de réaliser des profits, remettant sérieusement en cause la vocation même de l’enseignement supérieur.

Pour cette raison, nous attendons des réponses fortes de la part du futur président, afin que les grandes écoles cessent d’augmenter leurs frais de scolarité aux dépens des élèves, et que l’éducation, et non le profit, demeure la mission prioritaire des grandes écoles.

Axel Melot, étudiant en Master 1 Finance et Stratégie à Sciences Po Paris et Président de Junior Consulting Sciences Po

Les habituels débats sur le chômage, la dette, l’immigration, la sécurité, et l’écologie ne font aucun doute : la campagne électorale est bien lancée. La place des jeunes et leurs attentes semblent néanmoins être en retrait de ces débats. Le président élu en 2022 devra pourtant faire face à des défis majeurs en ce qui concerne les jeunes, et plus particulièrement les étudiants.
L’accès à l’emploi est certainement le principal enjeu des étudiants aujourd’hui. Le taux de chômage des 15-24 ans s’élevant à près de 20 %, il est primordial de renforcer la professionnalisation et l’intégration des jeunes sur le marché du travail. Les contrats d’apprentissage et de professionnalisation sont un des principaux leviers à activer, et le futur gouvernement devra continuer à soutenir les alternants et les entreprises les accueillant.

Un autre de ces défis est l’ouverture internationale des étudiants. L’abandon du programme Erasmus+ par le Royaume-Uni est à mon sens une grave erreur, et la France doit au contraire soutenir et encourager la mobilité des étudiants français.

L’équipe de Diplo’Mates, association étudiante d’emlyon business school

Cette année, notre association étudiante, Diplo’Mates, a mis à l’honneur la question de l’écologie dans les relations internationales, en organisant une simulation de négociations multilatérales sur le thème de l’Amazonie, ouverte à tous les étudiants. Ce qui est ressorti des échanges, c’est l’importance, pour toute une partie de la jeunesse française, de voir la France prendre des mesures claires sur les questions d’ordre écologique et climatique, tout particulièrement au niveau international. 

Lors du précédent mandat, de vifs échanges entre le Président français et le pouvoir brésilien, sur la question de la déforestation en Amazonie, avaient fait émerger une série de menaces de la partie française, comme celle de freiner le projet de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur. Cet accord a pourtant été relancé quelques mois plus tard. Déçus par cette nouvelle, nous sommes convaincus que se montrer plus intransigeant sur ce type de conventions permettrait à la France et l’Europe de gagner en crédibilité et de réaliser des avancées plus nettes sur la question de la transition vers une économie durable.  

En tant qu’association étudiante, nous souhaitons mettre en avant notre volonté de voir se renforcer la vigilance écologique au niveau des relations commerciales et diplomatiques avec les autres régions du monde, notamment concernant l’empreinte carbone de la production et du transport de marchandises.

>>> A lire aussi : Egalité femmes-hommes : étudiants, quelles mesures attendez-vous aux Présidentielles 2022 ?

Chérifa El Fraygui, étudiante en L3 PGE, responsable du pôle évènementiel de l’association HOPE à SKEMA BS Paris & Léa Martinez, étudiante en MSc International Business & Business Development, Vice-Présidente de l’association

1. L’environnement. Les étudiants espèrent la poursuite et l’intensification du Plan climat dans l’espoir d’atteindre les objectifs fixés par la COP21. « Cela passe selon moi par la décroissance. Pour atteindre nos objectifs en terme de protection de l’environnement tout en conservant nos emplois, notre économie, il est nécessaire d’avoir recours à l’économie circulaire, l’innovation et plus largement, à la relocalisation des entreprises sur le territoire français et européen mais aussi la mise en œuvre d’une fin des accords commerciaux avec les gouvernements opprimant des populations » – Léa

2. Education. « Les inégalités scolaires se pérennisent et s’intensifient avec la pandémie. Il est selon nous primordial de développer le budget dans les zones ZEP pour réaliser du tutorat, mais certains quartiers de banlieue nécessitent plus d’investissement, notamment dans les infrastructures (logements insalubres par exemple). Pour les étudiants à proprement parler, il faudrait envisager une augmentation des bourses sur critères sociaux car elles ne sont pas suffisantes pour des étudiants qui vivent dans la précarité au quotidien » – Chérifa

 3. Précarité menstruelle. « Selon une étude présentée dans le journal Le Monde en juillet 2019, 1,7 million de personnes sont concernées par l’insécurité menstruelle en France. L’année dernière, le gouvernement français a annoncé un projet concernant la précarité menstruelle étudiante. Or, la précarité touche toutes les personnes menstruées. Un dispositif inclusif pourrait permettre de lutter contre ce fléau, le gouvernement pourrait proposer une P-carte. À l’instar, de la carte vitale, la P-carte serait distribuée à toutes les personnes menstruées et leur permettrait de se procurer des protections hygiéniques gratuitement. Un budget serait alors alloué par an » –  Léa

Eddy EDOM, étudiant à l’ESTP Paris et Président de Pol MUN ESTP 

En posant la question autour de nous, nous nous sommes rendus compte que nos camarades n’attendaient pas grand-chose de la future Présidente ou du futur Président, ou plutôt, ils ne s’intéressaient même pas à ce sujet. Est-ce par désintérêt total ou par lassitude de la comédie qu’est le monde politique aujourd’hui, nous l’ignorons.

Ce qui est certain en revanche, c’est que si nous voulons que notre système continue de prospérer, il faut que le peuple s’intéresse à nouveau à la vie politique et pour cela il faut s’attaquer aux racines du problème. En effet, la population est divisée, plus personne ne s’écoute. La personne qui sera élue en 2022 se devra d’être fédératrice sans pour autant céder aux désirs de chacun.

La question environnementale et climatique se doit d’être une de ses priorités, si ce n’est la principale. Les questions de l’éducation, de l’égalité femme-homme, de la lutte contre les violences conjugales, de la réduction des inégalités sociales, du pouvoir d’achat, de la santé et du bien-être des français en général devront aussi être abordées.

Antoine Donnarumma, étudiant en M2 à l’ESCP

La stabilité et le renforcement des liens avec les pays membres de l’Union européenne. Les grandes écoles et les universités ont opéré une mue de leur positionnement politique depuis la dernière élection présidentielle. Alors que le parti de droite est souvent considéré comme l’archétype du porte-voix de ces étudiants, le rapport de l’association de sondages d’HEC Paris (représentative d’HEC, de l’ESSEC, l’ESCP, l’emlyon, l’EDHEC, Audencia et GEM) décrit qu’au premier tour de l’élection présidentielle de 2017, 55 % des étudiants ont voté pour Emmanuel Macron et plus de 80 % avaient une vision favorable de l’Union européenne (Source : Rapport du sondage d’HEC Paris). Ces chiffres ont la même tendance à l’IEP de Paris, de Lille et dans les principales universités françaises.

Cette évolution traduit l’attachement des étudiants à la mobilité internationale lors de leurs études. Les programmes d’échange liés à l’Union européenne (Erasmus, etc.) tout autant que les bourses qui y sont attachées et la gratuité des frais de scolarité lors du séjour sont un argument majeur pour l’investissement des étudiants dans leurs études supérieures. Les avantages de ces séjours sont multiples : opportunités de rencontre, de travail (dans le pays d’échange mais aussi d’origine), apprentissage d’une nouvelle langue, d’une nouvelle culture, développement de l’esprit critique et développement personnel. Il est surprenant de voir aujourd’hui des candidat(e)s aux élections présidentielles, souvent sortants de ces mêmes institutions, soutenir qu’ils / elles sont en désaccord avec l’idée européenne. « Si vous n’aimez pas ça, n’en dégoûtez pas les autres » !

Propos recueillis par Clara Guillet, responsable blog de l’association GEM Entreprendre auprès d’un panel d’étudiants

Dynamiser l’entrepreneuriat a été l’un des fers de lance de Macron tout au long de son mandat. En effet, l’un des objectifs de la loi PACTE (2019) est de favoriser l’entrepreneuriat par la simplification de la création d’entreprise et la revalorisation du statut de micro-entrepreneur. Ainsi, en tant qu’étudiants, poursuivre cet effort de soutien à l’entrepreneuriat est, à nos yeux, primordial puisque beaucoup envisagent cette voie. Ensuite, les problématiques environnementales sont aujourd’hui centrales, en témoignent notamment la COP26 et les discussions en France autour du référendum sur le climat. Alors que nous, étudiants, sommes à quelques années d’intégrer une entreprise et que beaucoup feront du respect de l’environnement un critère, il apparaît aujourd’hui essentiel d‘agir concrètement pour le climat.