Anastasia Colosimo © Arte

Rencontre avec Anastasia Colosimo, esprit juste et libre

Lorsqu’eut lieu la tuerie de Charlie Hebdo, Anastasia Colosimo était encore étudiante en thèse à l’Ecole doctorale de Science Po. Au-delà du choc général, ces évènements trouvèrent une résonance toute particulière chez cette jeune femme brillante et énergique, travaillant depuis plusieurs années sur le thème du blasphème, précisément. C’est ainsi qu’un an plus tard, seul livre sur le sujet écrit par une représentante de la génération dite Bataclan, paraissaient Les Bûchers de la liberté, analyse tranchante du problème envisagé dans la plupart de ses aspects et débouchant sur une vision très convaincante de la situation qui est aujourd’hui celle du rapport au religieux qu’entretient notre société, par-delà les faux-semblants…  – Par Hugues Simard

 

Lorsqu’a eu lieu la tuerie de Charlie Hebdo, vous réfléchissiez depuis déjà un certain temps aux enjeux théologie-politiques posés par le fondamentalisme…

Je travaillais en effet sur le blasphème depuis trois ans dans le cadre de ma thèse à l’école doctorale de Science Po. Cet établissement m’a offert la chance de pouvoir aborder ce sujet de manière pluridisciplinaire. Cette approche, tout à la fois politique, juridique et théologique, était nécessaire à la bonne appréhension d’une problématique aussi complexe. Je me suis ainsi également inscrite en Droit et criminologie à Assas, afin de mieux comprendre ce qui concernait le fondamentalisme religieux, la criminalité qui lui est liée, ses attendus idéologiques, la promulgation de fatwas… Par ailleurs, les aspects juridiques constituaient à mes yeux un réel enjeu au niveau européen. Mon propos a en effet consisté à démentir cette idée fausse selon laquelle le bloc occidental, par opposition aux pays fondamentalistes, serait totalement émancipé de la condamnation pour délit de blasphème. Ce n’est pas vrai, et il est nécessaire de posséder des connaissances juridiques pour bien le comprendre et expliquer l’état actuel de cette législation particulière. Plus généralement, un sujet comme celui-ci, pour être traité en profondeur, exige une maturation que seul le temps autorise. J’avais pu pour ma part le digérer, envisager toutes les possibilités.

 

Qu’est-ce qui vous a amenée à vous intéresser plus particulièrement à ce sujet ? Qu’est-ce que vous a permis de pressentir l’importance cruciale que celui-ci allait revêtir ?

Depuis les affaires Salman Rushdie en 1989, Houellebecq en 2001, et avant même que la polémique autour des caricatures de Mahomet et le massacre de Charlie Hebdo ne viennent cristalliser le problème, s’étaient déjà tenus une multitude de petits procès moins médiatisés, et une transformation juridique avait déjà eu lieu, les lois avaient changé. Ce sujet m’apparaissait passionnant en ce qu’il en éclairait beaucoup d’autres, en ce qu’il est symptomatique tout à la fois du retour du religieux et de la difficulté de nos sociétés occidentales modernes à l’aborder, particulièrement en France. Cette capacité de cristallisation en laissait deviner l’importance, ainsi que la faculté de mettre à jour certains manquements politique, ou encore des angoisses sociales…

 

Retrouvez l’intégralité de cet entretien réalisé par Hugues Simard,
sur www.mondedesgrandesecoles.fr