Christine Naschberger - © F Sénard, Audencia Business School

Le réseautage, clé du leadership au féminin

Les femmes consacrent moins de temps au réseautage. Et quand elles s’impliquent dans une logique de networking, elles le font plus par besoin de conseils que par pure stratégie de carrière. Pourquoi et comment pousser les femmes à mieux utiliser ces outils ?

 

Le 5 à 7 du networking

Statistiquement, le réseautage est une chose qui se vit dans l’entreprise entre 17h et 20h. Les hommes ayant coutume de rester plus tard sur leur lieu de travail, ils sont donc de facto favorisés dans l’utilisation de cet outil plus que jamais nécessaire à l’autopromo en interne. Au-delà d’une question de timing, les femmes ont également développé une certaine défiance face à la notion même de networking.  « Un terme qui renvoie au travail et donc à un a priori négatif pour celles qui souhaitent trouver l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle », indique Christine Naschberger, professeur de management à Audencia Business School et experte de la question du réseautage au féminin.

 

Réseau de femmes = antichambre du féminisme ?

Le manque d’intérêt des femmes pour les réseaux professionnels est aussi une question d’habitude. « Alors que les hommes sont depuis longtemps impliqués dans des logiques de réseaux (les Gentlemen’s Club existent depuis toujours), ce n’est pas le cas des femmes », ajoute-t-elle. « Elles souffrent aussi d’un véritable manque de connaissance quant aux vertus du réseautage : elles ne sont pas formées à ça et ne savent pas à quel point cela peut les aider à faire avancer leur carrière. » Une réaction très française selon l’enseignante. « Femmes ou hommes, beaucoup hésitent à s’engager dans des réseaux féminins de peur  d’être stigmatisés comme des féministes. Un problème qui se pose beaucoup moins hors de nos frontières. Le premier ministre canadien Justin Trudeau n’a pas exemple aucun problème à se déclarer féministe. »

 

Un espace de solidarité

Et quand elles décident de s’impliquer dans un réseau, les femmes ne poursuivent généralement pas les mêmes objectifs que leurs homologues masculins. « Alors que les hommes font clairement appel aux réseaux dans une logique courtermiste d’avancement de carrière, les femmes s’inscrivent plus dans une logique d’échange et de conseil. »  Une logique qu’elles ont tendance à poursuivre dans des réseaux de femmes où elles trouvent plus de solidarité et de partage. « Entre elles, elles ne sont pas dans la revendication mais dans une approche positive visant à faire évoluer les choses. » C’est d’ailleurs pour cela que les hommes, de plus en plus sensibles aux questions d’équilibre et de bien-être au travail ont tout intérêt à se rapprocher de ces réseaux. « Leur force est dans la mixité », martèle Christine Naschberger.

 

Les clés du réseautage au féminin

Sensibiliser les lycéennes et les étudiantes

S’inspirer des success stories : les femmes puissantes font toutes partie d’un réseau

Arrêter l’autocensure

Pousser les réseaux à communiquer sur leur utilité à long terme

Faire appel aux réseaux pour être plus que jamais actrice de sa carrière

 

Les réseaux promoteurs d’un management post moderne

S’ils ouvrent bien sûr des portes aux femmes qui y adhèrent, les réseaux féminins sont aussi des outils qui soutiennent, voire impulsent, le renouveau managérial. C’est d’ailleurs l’objet de la première étude centrée sur les réseaux féminins lancée par la Chaire IPAG  Entreprise inclusive  en février dernier. Le programme de recherche « Des femmes et des réseaux » propose en effet d’effectuer la première étude française d’ampleur sur l’influence des réseaux féminins et pro-mixité des grandes entreprises françaises des secteurs industriel, technologique, bancaire et assurantiel. Une étude poursuivant un triple objectif : promouvoir l’égalité au travail, soutenir la croissance durable et ainsi défendre l’intérêt général. Quels sont les nouveaux outils de l’égalité au travail ? Agilité et inclusion au travail : tandem de choc vers un management post-moderne plus paritaire ? Pourquoi promouvoir un modèle de carrière horizontale plus à même d’établir un lien équilibré entre vie pro et vie perso ? Autant de questions que la Chaire éclairera dans les prochains mois.

 

Et dans l’enseignement supérieur ?

Ecarts de salaires, omniprésence masculine aux postes à responsabilités : l’apanage des entreprises ? Parce que les femmes sont confrontées aux mêmes inégalités dans l’Enseignement supérieur, l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) a mis en place le Réseau francophone des femmes responsables dans l’enseignement supérieur et la recherche (RESUFF) afin de promouvoir l’égalité au sein de la gouvernance universitaire. « Alors qu’on compte 52 % d’étudiantes en licence et master il y a à peine 10 % de femmes aux postes à responsabilités dans l’ESR », indique Jean-François Lancelot, responsable de la Direction Veille, Innovation, Expertise de l’AUF. « Pour aider les femmes à faire évoluer leur carrière, nous avons mis en place des modules de formation sur le genre. Des formations tutorées permettant d’acquérir ces mécaniques de leadership ». Il distingue également trois chantiers prioritaires : la sensibilisation (des femmes et des établissements), la formation, mais aussi l’obligation. « Nous devons inciter fortement les établissements à respecter la parité dans les CA et les conseils scientifiques. »

 

Dans cette optique, l’AUF mettra en place l’Observatoire francophone du genre à l’université en 2018. Objectifs ? Dresser un état des lieux de la situation des femmes dans les universités francophones et impulser un politique favorable à l’égalité dans l’ESR.

« Les jeunes talents doivent montrer que l’égalité femmes / hommes est un critère déterminant dans le choix de leur employeur »