La crise pandémique actuelle a un impact énorme sur l’enseignement supérieur. La révolution numérique est en marche : avant la pandémie, les cours en ligne étaient pour la plupart une exception, et les méthodes d’apprentissage numériques n’ont jamais été privilégiées… Il est essentiel d’examiner les signaux de changement dans l’enseignement supérieur et de dessiner des scénarios futurs possibles avec plus d’opportunités que de menaces. Des changements urgents sont nécessaires pour envisager le secteur sous l’angle d’une création non disruptive.
De nouvelles tendances pour une nouvelle normalité
Une tendance s’est dessinée en faveur de l’apprentissage en ligne, facilité notamment par les grèves des transports en 2019. La pandémie de coronavirus a accéléré le processus d’adoption des cours en ligne, même si tous les pays ne le font pas à la même vitesse. Les professeurs et les étudiants doivent travailler chez eux en raison de la fermeture de leur établissement. Les écoles supérieures n’ont eu d’autre choix que de s’adapter rapidement à cette perturbation. Cependant, nous ne savons pas encore si cette adoption va s’ancrer dans la durée et les mentalités des Français car il nous manque une pièce essentielle du puzzle, à savoir l’établissement d’un véritable lien de confiance entre les universités et les étudiants.
Les scénarios possibles
Bien sûr, nous souhaitons tous que la crise prenne fin et que les choses reprennent leur cours normal. Cependant, certaines universités envisagent de mettre en place un enseignement à distance permanent au cours des prochains semestres tout en respectant des règles différentes. Quand on parle d’avenir, on ne considère pas seulement une situation de retour à la normalité. Nous incluons au moins quatre scénarios plausibles : croissance, effondrement, contrainte et transformation (Jim Dator, 1979).
Scénarios pour l’avenir
Dans les circonstances actuelles, nous proposons de construire nos scénarios alternatifs selon les deux axes suivants :
1) le virus va disparaître (ou non)
2) nous allons revenir à une vie normale (ou nos vies resteront modifiées à long terme) :
Nous voyons diverses menaces à l’horizon, y compris pour le secteur de l’enseignement supérieur. Il est essentiel d’envisager les problèmes sous l’angle des opportunités. Nous sommes confrontés à des contraintes tous les jours parce que l’accès aux technologies n’est pas réparti de manière égale. Depuis les grèves de 2019 et, plus récemment, le premier confinement, les établissements d’enseignement supérieur se préparent progressivement à l’enseignement à distance et, par conséquent, au passage de tous les processus éducatifs au numérique.
Révolution numérique : Test national pour l’enseignement supérieur
Nous participons actuellement à un test national dans une situation sans précédent. Bien entendu, nous ne pouvons pas juger précisément de l’impact de l’apprentissage en ligne à l’avenir, car le processus de prédiction de l’avenir n’est pas déterministe. Cependant, nous faisons tout notre possible pour améliorer l’expérience des étudiants tout en renforçant les solutions numériques et en étant prêts à tous les scénarios possibles, y compris la possibilité d’un apprentissage en ligne à long terme. Il est intéressant de noter que la France s’adapte assez rapidement aux tendances mondiales, y compris à l’enseignement en ligne. Cependant, le modèle d’éducation entièrement numérique est totalement différent de celui des États-Unis.
Création non disruptive
Nous observons un processus de création non disruptive, qui est très différent de la disruption (inventée par Clayton Christensen dans les années 90). Nous avançons par tâtonnements parce que nous n’attendons pas de revenir à la vie que nous connaissions avant Covid-19. Nous sommes en train de vivre une transformation qui fera passer l’éducation à un environnement complètement différent. Les TIC joueront un rôle plus important dans la définition de la manière dont nous pouvons interagir avec les étudiants de manière moderne et numérique. Cette stratégie non disruptive crée plutôt des opportunités nouvelles et différentes que de détruire les anciennes formes d’enseignement. Étonnamment, nous ne savons pas comment définir « différent » dans ce cas.
Nous n’avons pas la capacité de prédire l’avenir. Néanmoins, si nous réussissons ce test important de choc mondial, nous aurons la capacité de relier nos processus d’enseignement aux événements de l’environnement extérieur et de créer le paysage des possibilités, où l’avenir sera tout simplement meilleur.
Dr. David Kalisz est Docteur en économie dans la discipline des sciences de gestion, Professeur associé et responsable du département de gestion et stratégie à Paris School of Business (France).
Sylvia Gallusser est une futuriste basée à San Francisco