Dans la zone la plus touristique de la ville, la National Gallery of Art, près de l’allée menant au Capitole
Dans la zone la plus touristique de la ville, la National Gallery of Art, près de l’allée menant au Capitole

Sous les jupes de Washington

BROOKLYN, MANHATTAN, CENTRAL PARK… IMPENSABLE, POUR UN EUROPÉEN, DE DÉCOUVRIR LES ETATS-UNIS SANS PASSER PAR NEW YORK. MAIS QU’EN EST-IL DE WASHINGTON ? TROP SOUVENT RÉDUITE AU CAPITOLE OU À LA MAISON BLANCHE, PRENONS LE TEMPS, LOIN DES QUARTIERS FÉDÉRAUX, D’EXPLORER LA DEUXIÈME VIE DE LA CAPITALE.

 

Dans la zone la plus touristique de la ville, la National Gallery of Art, près de l’allée menant au Capitole © Alizée Gau
Dans la zone la plus touristique de la ville, la National Gallery of Art, près de l’allée menant au Capitole © Alizée Gau

 

Le temps d’un week-end, quel programme pour un touriste à Washington ?
De l’imposant Capitole où siège le Congrès, au temple démocratique érigé en l’honneur de Lincoln, il est bien naturel que le visiteur de passage prenne en ligne de mire le quartier Fédéral : on lèvera volontiers les yeux au ciel comme l’ont fait mille autres avant nous, en guettant les avions frôler l’obélisque la plus emblématique de la ville. A quelques pas de là, la Maison Blanche cernée de policiers à la mine sévère exige certainement un coup d’oeil. Un passage divertissant par le Musée de l’Air et de l’Espace, et il est déjà temps de repartir : on retiendra de Washington l’image d’une capitale imposante et aérée, avec ses immenses étendues de pelouses et les façades immaculées des bâtiments fédéraux derrière lesquelles s’est jouée l’histoire américaine… Une ville-musée ceci dit assez froide, arpentée çà et là par de hauts fonctionnaires. Mais d’ailleurs, où sont passés tous les washingtoniens ?

 

« C’est une ville où on a envie de construire sa vie. »

Derrière le Mall, une ville verte à taille humaine
Pendant ce temps, loin des quartiers fédéraux, les jeunes habitants de la capitale se retrouvent pour profiter de leur fin d’après-midi : ils viennent de Chicago, de New York, du Texas ou encore, des quatre coins du monde. Un tiers d’entre eux ont entre vingt et trente-quatre ans. Jeunes diplômés, leur revenu moyen est le second plus élevé du pays. « J’ai fait le choix de m’installer à Washington pour trouver un travail, car j’étais passionné par les relations internationales, explique Spencer, jeune diplômé originaire de Boston. C’est une ville incroyablement internationale et très accueillante pour les étrangers. Beaucoup de jeunes très motivés viennent ici pour trouver un travail dans le business ou au gouvernement. Il y a des gens qui veulent faire fortune, et d’autres qui veulent changer le monde ! »

En tête du classement 2014 des villes les plus populaires des Etats-Unis pour les jeunes diplômés (Fobs 2014, US coolest cities), Washington offre également à ses habitants de multiples activités récréatives une fois la journée de travail derrière soi : chaque fin d’après-midi, les roof tops branchés de la ville s’animent, la capitale se transforme en vaste terrain de jeu. D’un quartier à l’autre, on circule à pied, en vélo, et plus rarement en bus ou en métro. Près de la rivière Potomac, des terrains de beach volley permettent à tout un chacun de perfectionner son service et d’intégrer les équipes formées au bonheur des rencontres. Les amateurs de glisse s’essayent quant à eux au kayak ou au paddling le long de la rivière profitant, au passage, d’une perspective unique sur le National Mall et ses grands mémoriaux. « C’est le genre de détails qui me rappellent qu’ici, il fait vraiment bon vivre, confie Spencer. DC offre tout ce qu’on peut attendre d’une grande métropole, tout  en conservant un état d’esprit local et convivial : je ne ne vis pas très loin de mes collègues, de mes amis, et je croise souvent dans les mêmes bars les membres de mon équipe de kickball… »

Avec sa grande concentration d’espace verts, ses rues espacées et ses immeubles limités à quelques étages, Washington en vérité respire très sereinement et à son propre rythme : à l’ouest, Georgetown, vieille ville résolument hipster au cachet néo-industriel, avec ses murs de briques et son chenal aménagé où se succèdent friperies et cafés insolites. Au Nord, U street et ses enfilades de boîtes de nuit populaires rejoint Adam’s Morgan. Le quartier latino bigarré de la ville vibre au rythme endiablé des Drums Sessions : tous les dimanches au sommet du parc Meridian Hill, on ne s’étonnera pas de voir se trémousser face à un ensemble percussionnistes des silhouettes de tout âge et de toute nationalité, dansant vigoureusement au son des djembés. A quatre heures de route de New York, beaucoup de washingtoniens profitent de leur proximité avec la Big Apple pour s’étourdir de l’exubérante énergie de leur voisine concurrente. On se grisera le temps d’un week-end de cette impressionnante concentration de bars, d’animations et d’ethnies entremêlées. Mais peu échangeraient leur vie présente dans la capitale pour une place à Manhattan : « DC est le genre d’endroit où l’on vient surtout pour chercher du travail, et dont on tombe amoureux après-coup, résume Spencer dans un sourire. C’est une ville où on a envie de construire sa vie. »

 

QUELQUES BALADES hors des sentiers battus
Peu de visiteurs ont le temps d’explorer les quartiers moins touristiques de la ville. C’est pourtant là que se mesure la véritable atmosphère de Washington ! Sur le bord de la rivière Potomac, les promeneurs du dimanche apprécieront le chemin aménagé le long de la berge, où l’on peut voir quelques locaux derrière une canne à pêche, on simplement en train de « chiller ». Le marché bio de Dupont Circle est également une belle occasion pour déguster à tous les stands les fruits et légumes de saison ainsi que les fromages, terrines et confiseries locales. Envie de danser en plein milieu de journée ? Les Drums Sessions du parc Meridian Hill offrent une excellente occasion de se déhancher à ciel ouvert après avoir pris un verre sur un rooftop de Adam’s Morgan. Enfin, pour les curieux désireux d’en connaître davantage sur l’histoire de la capitale, des balades gratuites animées par des locaux permettent de découvrir la ville sous le prisme des fantômes de Georgetown ou des derniers scandales politiques !

 

UN PEU D’HISTOIRE sur Washington…
Construite volontairement à distance respectable de New York pour éviter une trop importante concentration de pouvoirs (et de corruption !) dans la ville alors la plus puissante des Etats-Unis, c’est George Washington en personne qui choisit le terrain vierge et vallonné sur lequel serait édifié la cité fédérale. En charge des plans de la ville, l’architecte français Pierre L’Enfant, qui rêvait de bâtir la capitale sur le modèle de Paris, s’écharpa à de nombreuses reprises avec le père fondateur des Etats- Unis : pour Washington, hors de question de pervertir son rêve américain d’un Etat fédéral libre et indépendant par quelques modèles décadents importés d’outre-Atlantique ! Naturellement, le président américain eut le dernier mot… Quelques siècles plus tard, la capitale, avec ses ambassades à chaque coin de rue, n’en a pas moins gardé un état d’esprit ouvert sur l’extérieur et plus européen que dans le reste du pays. George Washington se retournerait-il dans sa tombe ?

 

Texte et photos réalisés par Alizée GAU