« Les vraies réussites sont celles que l’on partage. » VINCI Construction n’hésite pas à les partager auprès de ses quelque 67 000 collaborateurs dans une centaine de pays. Une variété de projets qui fait écho à la diversité de ses équipes comme peut en témoigner Chloé Clair (X 97, ENPC, Berkeley 03, architecte DPLG 05), Chief Technical Officer de VINCI Construction.
Concrètement, quel périmètre d’actions recouvre votre fonction ?
Mon poste intègre 3 missions principales.
La 1re : animer la filière ingénierie à travers un travail collaboratif. Je suis l’architecte de l’ouverture et de la transversalité au sein du groupe.
La 2e : gérer la R&D et de l’innovation transverse au sein des différentes divisions de VINCI Construction pour porter les projets de transformation stratégique de manière centrale.
La 3e : mener la transition digitale. Il est essentiel d’adopter une politique globale et connectée en réseau dans une entreprise décentralisée. Mon rôle : détecter les early adopters dans l’entreprise et déployer leurs initiatives dans l’ensemble du groupe.
Quels sont vos enjeux clés ?
J’ai la chance d’occuper un poste en central et de choisir avec le CODIR les stratégies à suivre. Je suis l’artisane de mes propres combats mais il reste encore beaucoup à faire. C’est un vrai challenge ! Nous évoluons dans un domaine dans lequel il faut aller vite mais sans contraintes règlementaires car il faut être en avance sur les autres. Côté digital, mon principal enjeu repose donc sur le déploiement de solutions qui fonctionnent. J’ai alors proposé un benchmark pour identifier les meilleures pratiques en externe. Il s’est avéré que chaque idée avait déjà été déployée dans l’une de nos filiales, à nous de les déployer maintenant !
Pousser l’innovation en interne : Tous les 2 ans, un concours de l’innovation est organisé au sein du groupe VINCI pour détecter et promouvoir les meilleures innovations. Cela permet de faire du bottom-up et de mettre en valeur les idées terrain ; en 2017, 1874 candidatures ont été déposées, ce qui montre le dynamisme des collaborateurs en ce qui concerne l’innovation.
Comment appliquez-vous concrètement cette innovation dans votre métier ?
J’ai la chance d’arriver dans ce groupe avec une forte expérience terrain et chantier. Et je découvre le monde de l’open innovation, du data mining, de l’intelligence artificielle… C’est passionnant. Selon un rapport de Dell et l’Institut pour le Futur, 85 % des emplois en 2030 n’existent pas aujourd’hui. Alors je me suis posé la question : quels sont ces métiers dans la construction ? Nous sommes complètement dans la prospective ! L’École des Ponts vient ainsi de lancer un master spécialisé Design by Data pour former des computational design engineers ; nous accueillons des data scientists pour le domaine des infrastructures. Voilà vers quoi nous souhaitons tendre !
Quelle place pour les femmes dans la construction ?
La construction a le mérite d’être concret. On ne croise que des passionné-e-s. Les femmes dans la construction ne sont jamais là par hasard : nous y allons parce que nous le voulons. Je me bats donc pour la mixité : pour tout poste, l’employeur doit avoir au moins 1 CV de femme. Il sera alors sûr d’avoir affaire à une passionnée. Il faut attirer les jeunes ingénieures mais aussi les garder. Il est donc essentiel de communiquer en interne ses ambitions. L’expatriation par exemple pour une ingénieure n’est pas plus compliquée que pour un homme. Faites-le savoir !
Construire des carrières au féminin : « Dans la construction les femmes sont moins nombreuses ce qui nous rend plus visibles. C’est un avantage pour rencontrer les top managers et avoir un accès privilégié pour évoluer. Je suis ainsi la 1re femme au comité de direction de VINCI Construction à 40 ans. C’est une vraie fierté. Nous avons une connivence naturelle et nous ne sommes pas du tout en compétition. »
Quel regard portez-vous sur leur évolution dans l’entreprise ?
Pour favoriser l’évolution des femmes, le sujet doit être une priorité au plus haut niveau de l’entreprise. La fatalité n’existe pas même avec moins de 30 % de femmes en école d’ingénieur. Les femmes sont nombreuses à l’entrée dans l’entreprise mais elles évoluent rarement en tant que managers. À l’image des écoles, il est nécessaire de réfléchir aussi en entreprise sur la possibilité d’apprendre différemment.
Une femme de réseaux : Chloé Clair faisait partie des fondatrices de Welink, le réseau de femmes managers de Bouygues Construction. « De nombreuses Polytechniciennes me contactent car elles ont confiance en moi. J’accueille toutes les ingénieures car c’est un vrai plaisir de voir des femmes à des postes de responsabilités. Il faut une vraie volonté et une réelle prise de conscience. Chez VINCI, je n’ai jamais reçu de remarques déplacées liées à mon genre. Les comportements ont changé. »
Quel role model vous a poussée à rejoindre VINCI Construction ?
Mon chef ! Chez Bouygues Construction depuis 11 ans, j’avais envie d’un challenge. Je souhaitais quitter la Thaïlande pour prendre la direction d’un pays. Mais il m’a convaincue d’accepter un poste de direction technique. C’est un ancien Polytechnicien également et il a su m’emmener dans sa vision. Notre échange s’est avéré très constructif malgré nos divergences. Je l’ai convaincu car il cherchait un autre type de profils.
Quel est votre conseil aux jeunes ingénieures ?
N’hésitez pas à bouger même si cela est difficile. Il faut en être consciente pour être prête à relever des challenges. Mais le travail paie. En quelques mois à peine, beaucoup sont venus me féliciter pour le travail accompli en si peu de temps. Donc n’ayez pas peur car c’est aussi appréciable de se mettre en danger. Tous les métiers existent au sein de VINCI. Mais demandez-vous en amont ce dont vous avez vraiment envie. Ensuite, à nous de vous proposer les opportunités adéquates. Trouvez votre propre personnalité et ne la reniez pas. Plus il y aura de femmes, plus nous serons libres d’être qui nous sommes. En tant que femme, on peut parfois avoir une charge mentale supplémentaire mais rien qui ne vous empêche de prendre des responsabilités. C’est même mon mari qui m’a poussée à accepter cette opportunité.
Les atouts des jeunes Polytechnicien-nes : « Je ne suis jamais déçue par un ingénieur de l’X car il sait réfléchir sur n’importe quel projet. Nous avons une vraie qualité en termes d’analyse du problème. À Berkeley, mon professeur adorait les ingénieurs français pour notre enseignement abstrait. Il m’a alors appris à l’appliquer concrètement à travers une vraie culture du résultat. Mais n’oubliez pas l’essentiel : restez humble ! N’hésitez pas à reconnaître vos lacunes et à demander de l’aide car la discussion apporte beaucoup. »